La Malédiction des pierres noires (Odyssée, tome 1)

Tout le monde connaît des épisodes de l’Odyssée, mais on ne la lit plus guère dans son intégralité… Michel Honaker se propose de nous raconter les aventures d’Ulysse en français moderne, et en plusieurs gros tomes. Il a choisi de garder le contenu exact ; on apprécie par exemple les fameuses épithètes homériques, d’Ulysse « aux mille ruses » à Hermès « aux pieds ailés ». Le système narratif est lui bouleversé : la mise en abyme initiale (Ulysse sauvé de Calypso raconte son histoire à Nausicaa) n’existe plus. Ce faisant, la chronologie change, les pérégrinations d’Ulysse et celles de son fils Télémaque semblent coïncider temporellement. Télémaque a d’ailleurs beaucoup plus d’importance dans cette version que dans l’original : ce personnage jeune avait-il plus de chances d’impliquer les lecteurs ? Car Michel Honaker fait tout pour « dépoussiérer » l’Odyssée : les dieux nous parlent, mis en scène comme des mortels – querelleurs, évidemment - ; la vingtaine de vers d’Homère relatant la ruse du célébrissime cheval de Troie se transforme en trois chapitres… Il a choisi de mettre l’accent sur l’action, rarement sur les sentiments des héros. L’emploi d’un narrateur omniscient qui alterne les points de vue ne se prête de toute façon pas au récit psychologique. Son Odyssée devient alors un bon roman d’aventures mâtiné de fantastique, de qualité littéraire irréprochable, mais un peu plat. Homère ne se suffisait-il pas à lui seul ? A l’ombre de son modèle, l’auteur n’a pas vraiment décollé… et trois mille ans plus tard, Homère reste le plus moderne.

A voir : jusqu’en mai 2007, Homère, sur les traces d’Ulysse, à la Bibliothèque Nationale de France et en ligne à l’adresse suivante : http://expositions.bnf.fr/homere/

A lire pour les plus grands : Homère, Iliade d’ Alessandro Baricco (Albin Michel, 2006).