Voilà pourquoi les vieillards sourient

Marie-Sophie Vermot publie pour la première fois aux éditions du Rouergue, dans la collection pour adolescents « do A do », et elle signe un beau roman, sur des thèmes qui ne sont pas souvent traités en littérature pour la jeunesse. Dès les premières pages, le décor est planté, austère et dépouillé : une ferme isolée, dans le sud-ouest de la France, et un grand-père qui fait ses derniers préparatifs avant de quitter cet endroit où il a toujours vécu pour la « résidence du troisième âge ». Tout au long de cette dernière journée, qui constitue l’unique cadre temporel du roman, il est entouré de son petit-fils Harold, de son fidèle ouvrier et de quelques visiteurs de la dernière heure. Harold, lui aussi, a toujours vécu à la ferme, élevé par ses grands-parents ; à l’heure de la séparation, il est bien décidé à questionner son grand-père sur ce qu’il devine être un secret de famille, car dans quelques heures, Harold partira aux Etats-Unis pour un stage d’un an chez un architecte qui n’est autre que le frère de son grand-père, dont il ne connaissait pas l’existence. Bien malgré lui, le grand-père, « Gramp », raconte des bribes du passé, la guerre, la collaboration, la trahison du frère… Marie-Sophie Vermot nous raconte une confrontation entre un vieil homme sur le déclin et son petit-fils dans une narration volontairement lente, qui laisse percevoir tout le poids des non-dits et de la solitude, par petites touches, elle parvient à donner une âme à chacun des personnages, en particulier par leur langage, le discours du grand-père, par exemple, qui sans être caricatural, est celui d’un monde paysan tourné vers le passé. Voici donc un beau texte, au titre énigmatique, sensible et pudique, jusqu’au dénouement qui n’est donné qu’à demi-mots, ce qui le rend encore plus fort.