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Des livres pour les tout-petits : regard singulier sur la tradition orale

Romain RETHORE
1 janvier 1990



PARCOURS PROFESSIONNELS POUR LA LECTURE DE JEUNESSE



Café rencontre

Mardi 11 janvier 2005
13h30-14h30





Invitée :

- Michèle MOREAU, directrice de Didier Jeunesse



Michèle Moreau aime la tradition orale et ça se voit. Pour elle, la tradition orale a une valeur littéraire et n'est pas assez connue, compte tenu de sa richesse en poésie, histoire et autre scénario.






Qu'est ce que la tradition orale nous propose ?

C'est en répondant à cette question qu'elle nous rappelle que le conte fut un genre noble en Europe et en Occident, que la tradition orale fait parler le corps par la danse, que les vrais comptines de notre enfance sont composées de strates de mémoires collectives qui se sont accumulées de générations en générations pour donner un poids à ces quelques mots. Elle nous parle encore du sens caché des proverbes ou des devinettes, souvent oublié en Occident mais tellement fort dans les pays d'Afrique. Ce sens est plus efficace qu'un avertissement pour les enfants qui sont conscients de la distance à avoir avec l'histoire. Cette force de l'image enrichit aussi leur rapport à la langue. Elle finit sa liste par les domaines de la tradition orale qui s'adressent aux plus petits : la berceuse, qui est un jeu corporel entre le nourrisson et sa mère, et le conte d'avertissement pour les enfants. Ce dernier est là pour l'enfant qui joue à se faire peur, qui apprend à maîtriser son corps et se frotte à des sujets profonds par l'image, mais souvent il séduit tous les âges.



Pourquoi et comment mettre cette littérature orale dans le livre ?

La tradition orale est un mode de transmission qui se perd, souvent remplacé par la télévision. En Occident, c'est le livre qui est le lieu de mémoire de la tradition orale et en Afrique, des associations de conteurs en forment d'autres. Le livre est le premier objet culturel pour l'enfant qui apprend à l'apprivoiser. Par le livre, il apprend le sens des mots " début " et " fin ", il découvre des paroles et des images mis en espace. Il va le lire plusieurs fois et découvrir qu'il commence à connaître l'histoire ; il fait travailler sa mémoire visuelle et, si une personne la lui raconte, sa mémoire auditive (corporelle).

Le collectage des comptines pour Didier Jeunesse se fait en France pour s'adresser à des enfants qui vivent en France mais ne sont pas originaire de France. Des musiciens se renseignent à différents niveaux, comme les crèches. Il y a un vrai travail de rencontre entre les cultures. Le but de ces recherches n'est pas de trouver un conte ou une comptine précise mais des versions intéressantes.

C'est alors qu'une personne pose une question sur La souris et le voleur, écrit par Darwish et illustré par Christian Voltz. Michèle Moreau explique que la collection " A Petits Petons " a été créée il y a 4-5 ans par Véronique Soulet qui considérait qu'il y avait des lacunes dans le domaine du conte. Cette collection compte une quinzaine de contes d'origine traditionnelle pour les petits et est dirigée par Céline Murcier. L'exemple de La souris et le voleur est parlant ; le conteur a entendu l'histoire par sa grand-mère et c'est un classique dans sa région.




Lorsque c'est un conteur pur qui écrit un conte, il y a un gros travail sur l'écrit car le passage de l'oral à l'écrit ampute le conte de sa mise en scène. Il est important que l'illustrateur soit touché par l'histoire et ait la volonté d'apporter son univers au conte. Il est assez libre pour pouvoir s'exprimer et proposer des illustrations fortes. L'image met en scène le conte et ne retire rien au poids des mots.



Pour finir, pour son plus grand plaisir et pour le nôtre, Michèle Moreau s'est glissée dans la peau du conteur et, le temps de la lecture du conte " Les Deux Maisons ", nous avons retrouvé notre enfance…