Tu te souviens de moi ?

Sur la couverture, un vieil homme tient dans ses mains un cadre photo. Une fillette tourne son regard vers lui : deux personnages (petite-fille/grand-père), la mémoire entre eux, tels sont les éléments qui forment la question-titre Tu te souviens de moi ? de l'album signé Phil Cummings et Owen Swan.

La petite fille avance dans les couloirs d’une maison de retraite. C’est long, un peu oppressant. Lorsque la porte s’ouvre sur la chambre de Papi, le vieil homme est plongé dans la lecture d’un journal. Un fauteuil, deux énormes piles de journaux, la vie tranquille. C’est la fillette qui ouvre le dialogue : « Bonjour Papi ! »

Texte et illustrations marchent ensemble. Le grand-père répond : « Bonjour toi ». Il regarde sa petite-fille. Mais son regard est vague et la petite insiste : « Papi, [...] tu te souviens de moi ? »

Question sans réponse. Papi s’accroche aux souvenirs. Il déroule ce qu’évoque une photo d’enfance et parle. Mais, lorsque la fillette pose à nouveau la question (« Mais tu te souviens de moi ? »), on a l’impression qu’il n’entend pas.

Le récit progresse ainsi : de questions répétées en réponses « à côté », inadaptées. Papi se remémore des moments joyeux de l'enfance (lorsqu'il attrapait des têtards avec son frère oui qu'il dégustait le pain croustillant fait par sa maman) jusqu’à l'instant où la jeune fille comprend que ce n’est pas ainsi qu’elle communiquera avec son grand-père. Commence alors un deuxième temps dans le récit : celui du jeu vécu ensemble. A ce moment, dans l’instant présent, tous se rassemblent, heureux…

Le texte et l’illustration pastel sont d’une grande douceur. On éprouve l’inquiétude de l’enfant et son incompréhension qui est aussi celle du lecteur quel que soit son âge : comment est-ce possible de ne pas être reconnu ? La spontanéité de l'héroïne offre une solution : prolonger l’enfance créative et jouer. Superbe conclusion, tout en tendresse. Un album pour échanger sur le vieillissement, la décrépitude sans cacher la difficulté, mais aussi sans désespérance. Une belle leçon pour tous.