Que dit la mode ?

« Que dit la mode ? » Nous interpelle ce nouveau titre de la collection POCQQ. D’emblée, le ton est donné : loin des photos retouchées des magazines, ce livre-là va inciter le lecteur à remettre en question certaines de ses idées qui façonnent parfois son comportement.

Pourtant, quoi de plus épidermique que la mode ? On aime, on n’aime pas, on achète (compulsivement parfois, pour « déstresser »), on est fashionista, beaucoup de clichés souvent déclinés au féminin avec ce qu’ils comportent de péjoratif aussi. Et de temps en temps un bon gros scandale…

En quatre chapitres, Anne Botella dresse le portrait historique et contemporain de ce phénomène social qu'est la mode. Elle privilégie son évolution historique et ses conséquences économiques et décrit comment d’un outil de distinction, la mode est devenue le symbole d’une production de masse, rapide et éphémère, un super indicateur de la société de consommation. Elle a sacrifié au passage la qualité des matières et de la confection pour privilégier, grâce à la médiatisation, l’uniformisation de l’apparence et le suivisme des foules attirées par le clinquant des défilés, l’éclat des photos sur papier glacé, et la fausse intimité des rumeurs sur la vie des top-modèles. À cela, l'autrice oppose la quête récente de durabilité, de recyclabilité. Mais aussi un retour à l’éthique d’une production qui ne sacrifie pas les ouvriers et ouvrières du textile sur l’autel de la rentabilité. La mode, oui, dit Anne Botella, mais pas à n’importe quel prix.

Assortie de petits cartouches « Kézaco ? » qui distillent des précisions sur chaque question abordée : « Making of de l’atelier (pour la haute-couture)», « L’émergence des top-modèles »,« Le cycle de vie d’un produit », « Le surcyclage »…, la présentation est ludique, rythmée par les illustrations d’Elodie Perrotin, toujours stylisées, colorées, très réussies. Pour autant, les injonctions de la mode et de ses représentants trouvent parmi les lecteurs et lectrices potentiels de ce séduisant petit livre un public docile et crédule, parfois victime. Que dire des ravages du diktat de la minceur ? Du modèle imposé de la beauté représentative ? De la valorisation des marques ? Aujourd’hui relayés par les nouveaux gourous que sont les influenceurs/ceuses, cette addiction à l’apparence, au regard d’autrui, aurait mérité d’être abordée plus ouvertement afin de compléter l’analyse.

Souhaitons qu’inscrits dans la logique de la collection, les débats et la réflexion s’ouvriront grâce à cet ouvrage et permettront d’aborder aussi cette dernière problématique.

Un bon titre, pour réfléchir aux choix que la vie nous propose.