Merlito

Titu Titu Titu. De retour à la maison, Merlito est là. Il chante, même si on ne le voit pas. Puis soudain, le voilà parti. Titu Titu Titu, on ne le voit plus. Le petit garçon ne l’entend plus, jusqu’à son prochain passage... L’ouvrage avance ainsi comme un jeu de cache-cache : l’oiseau apparaît, puis disparaît tandis que le garçon, lui, s’amuse avec son masque. « Où es-tu ? M’entends-tu ? Que fais-tu ? » lance-t-il finalement à l’oiseau en révélant son visage derrière le masque.

Florence Gilard travaille depuis 20 ans dans le domaine de la petite enfance comme formatrice et lectrice. Cet ouvrage est son premier album jeunesse et s’adresse aux tout-petits qu’il accompagne dans leur apprentissage de l’absence. Bien sûr le merle n’est jamais très loin et sa proximité suggérée – notamment par le nom familier de Merlito – est de nature à rassurer le jeune lecteur. Les illustrations à base de collages et de crayon dessinent un univers à hauteur d’enfant : la maison – cadre de l’histoire, du retour jusqu’au coucher – les jouets, l’encadrement de la fenêtre. Par contraste, le monde du dehors, celui de l’oiseau, esquissé par quelques tâches d’une encre fluide, apparaît plus mystérieux. Le texte est simple et se résume au chant répétitif de l’oiseau entrecoupé de brèves interrogations. Mais c'est un livre qu’on peut lire en réalité de multiples façons et qui se révélera un excellent support pour jouer avec l’enfant sur le mode « coucou, je suis là ! ». Entre les lignes, les silences laissent la part belle à l’imagination : où est l’oiseau quand il ne chante plus ? plane-t-il au-dessus de la maison comme le suggère l’enfant en dessinant ? Que peut-il bien y avoir derrière le cadre de cette fenêtre ?

Merlito est édité chez Esperluète, une maison d’édition belge connue pour son exigence et ses ouvrages atypiques à l’esthétique ciselée. Un parti pris artistique trahit ici une influence japonisante tant dans le traitement des personnages que celui de la végétation ou le minimalisme de la maison. C’est aussi un beau livre objet au papier qualitatif et jusqu’aux finitions : les cahiers sont cousus avec un fil orange, couleur que l’on retrouve dans les illustrations et choisie pour la couverture.