Les yeux Fayoum

Dans ce deuxième volume consacré au partage de leur découverte de l’Égypte, Ramona Bădescu et Benoît Guillaume entraînent les lecteurs dans une découverte très sensorielle de la région du Fayoum, célèbre pour l’antique tradition des portraits funéraires qui ornaient les sarcophages appuyés sur les murs des maisons. 

En maître de la vibration, Benoît Guillaume fait palpiter lumière, couleurs, et contrastes dans des paysages chamarrés. L’affolement et la saturation du regard, produits par cette vibration, butent soudain sur les hypnotiques iris, limpides et pleins de douceur, des hommes et des femmes représentés sur ces portraits. 

Aussi, dans ces regards qui nous répondent, Ramona Bădescu lit pour nous le reflet de la vie contemporaine. Au-delà de l’admiration qui naît de la contemplation, le poème comme l’image font le lien entre hier et aujourd’hui, la multitude de traces monumentales, spectaculaires, et la réalité quotidienne, prosaïque, soumise comme autrefois à des aléas naturels ou issus de la volonté des hommes.

En interpellant le personnage évoqué dans son poème, Ramona Bădescu propose au lecteur de s’identifier à lui, l’incitant à ressentir l’environnement, à s’imprégner du moment. Avec le motif textuel « Te souviens-tu », déjà présent dans L’heure égyptienne, elle va plus loin, et suggère le retour dans le passé du portrait réalisé par Benoît Guillaume. Un portrait qui reprend les codes de la tradition du Fayoum, la représentation d’un visage et d’un regard qui retient celui qui s’y arrête, dans un moment de communication muette … 

Un carnet de voyage captivant qui mérite qu’on s’y arrête, pour une longue étape. Une initiation artistique aussi, où l’art de la contemplation et son commentaire intérieur tissent patiemment le lien entre peinture et poésie.