Adèle mortadelle

Adèle a une maman, un papa qui est plus souvent au travail qu’à la maison et deux grandes sœurs. La vie va, avec les petites disputes, les énervements, les jeux et les blagues. Et les grandes disputes, le soir, entre les parents, lorsque « papa rentre quand la maison est endormie » et que « maman rage, enrage. » Finalement les parents d’Adèle se séparent : papa quitte la maison avec ses deux filles et la petite fille reste avec sa maman. Que la maison est vide alors. Adèle se sent perdue, désemparée, son père lui manque. Alors le chat que maman amène à la maison va devenir son confident et son consolateur, un chat sage, un peu fou aussi qui l’entraîne dans une rêverie douce, parce que lui dit-il : « Les mots ne suffisent pas toujours à raconter tout ce que l’on a sur le cœur. La petite personne que tu construis à l’intérieur, morceau par morceau, trouve l’inspiration dans les histoires qui l’entourent. » Petit à petit, Adèle se reconstruit.
Un thème difficile : la famille décomposée, recomposée, la séparation, traité de manière à la fois très réaliste et très poétique ; un album où les sentiments sont à fleur de pages et de mots, où l’espoir et la vie sont bien présents.
On sent tout ce que Audrey Callejas met dans cet album, très personnel, et qui parle à tous aussi. Son traitement graphique, qui peut dérouter de prime abord, à cause des pages éclatées, permet de montrer une foule de choses de manière très précise, très expressive: la vie quotidienne de la famille, la crise qui fait qu’elle éclate, tous les sentiments qu’éprouve la petite Adèle, la manière dont elle surmonte l’éclatement familial. Des notes de couleurs viennent, parfois, animer le dessin en noir et blanc, des très gros plans montrent la colère, des rayures noires envahissantes montrent la tristesse. La narration progresse de différentes manières : un récit à la première personne donne la voix d’Adèle et puis des dialogues dans des bulles, au sein de pages qui ne sont pas construites comme une bande dessinée.
C’est un beau travail, sensible et sincère.