Aller au contenu principal

Rechercher un livre

Date de publication
Age-cible

Barjoland

Roman
à partir de 13 ans
178 pages
: 9791096935383
12.50
euros

L'avis de Ricochet

Saluons tout d’abord l’attractivité de la couverture de ce roman, le portrait photographique d’un clown. Il évoque le personnage du bouffon, perruque rousse, visage blanchi et regard acéré souligné de fard, meurtrissures et fausses balafres sanguinolentes, l’attitude à la fois pensive et un brin menaçante. Le titre, Barjoland, renforce la première impression et résonne comme la promesse de sensations fortes.

Dans la collection Rester vivant, les éditions du Muscadier attirent le lecteur dans leurs rets, et ce titre en manière de tampon d’accréditation, ou de contrôle sur un document d’identité, atteint ici parfaitement cet objectif. Mais ce choix correspond-t-il au roman de l'auteur Jean-Luc Luciani ?

Son héros Damien appartient à l’élite bourgeoise de la société : parents galeristes, scolarisé dans une « boîte privée », il n’a pas de personnalité bien affirmée, son identité est celle de son groupe de potes. À travers lui, Jean-Luc Luciani dresse le portrait de la jeunesse d’une classe sociale dont on comprend mal qu’elle soit présentée comme victime : l’argent ne fait-il pas le bonheur (les vacances de Noël dans une station de ski branchée par exemple) ? Mais l’égoïsme, voire le cynisme de leur comportement révèlent chez ces adolescent(e)s une triste absence d’espoir et de rêves.

Damien est celui dont l’auteur expose les blessures. Son père est mort récemment, et le garçon survit avec ce vide en lui qu’il ne peut pas partager. Sa mère veut refaire sa vie, et lui impose un inconnu, psychologue très médiatisé, spécialisé dans le commentaire en ondes des crises adolescentes. Sa suffisance, sa goujaterie déclenchent instantanément une réaction de rejet chez Damien, rejet qui comme une boue intérieure va peu à peu l’envahir et le submerger. Damien est en danger quand sa mère baisse les bras devant le professionnalisme pervers de son nouveau compagnon.

L’action se déroule en quelques semaines, l’intensité dramatique croît au fur et à mesure des actes, souvent déclinés en une unique scène, jusqu’au geste évoqué de Damien le soir du 25 décembre. L’apothéose est pourtant encore à venir : c’est la réaction de l’adulte attaqué qui en tient lieu, ici totalement déstabilisé et ramené à des pulsions immatures disproportionnées et menaçantes.

Ce coup de projecteur sur des jeunes qui attendent juste d’être des copies conformes de leurs parents est l’image subliminale du roman ; on plaint le pauvre Damien qui ne mérite pas ce qui lui arrive, mais qui finira par échapper au malheur. On ne peut toutefois s’empêcher de se poser la question : que serait-il arrivé à un jeune moins protégé par son milieu, sa classe sociale ?

C’est bien à un drame de théâtre auquel on assiste. Mais Luciani imagine un astucieux stratagème narratif : le sort du personnage du prof d’histoire au bord du suicide, qui agit comme une petite veilleuse d’alarme, et clignote désespérément au fil du roman, constitue le récit parallèle qui incite petit à petit le lecteur à se questionner sur le contexte, ou l’envers du décor. Le vrai drame n’est pas toujours celui qui se voit, c’est l’élection de Trump aux États-Unis qui déclenche le zoom de la caméra de Luciani sur le fonctionnement de cette micro-société, qui, entre autres, a rendu possible l’avènement d’un fou grotesque. Barjoland n’est pas cet espace confiné où l’on parque les adolescents malheureux de vivre, mais le monde hypocrite et lâche dans lequel ils évoluent, eux et tous les autres, faisant mutuellement de leur vie un enfer.

Jean-Luc Luciani affirme qu’il écrit « pour les adultes de demain » : souhaitons que la découverte de ce roman soit l’occasion d’une lecture éclairée pour les adolescents à qui il s’adresse. Il confirme en tout cas qu’écrire pour la jeunesse peut être un vrai défi.

Présentation par l'éditeur

L’univers de Damien bascule le jour où il apprend, d’une part, que les Américains ont élu Donald Trump à la tête des États-Unis et, d’autre part, que sa mère envisage de refaire sa vie avec un psy qui anime une émission de radio destinée aux adolescents. Entouré de ses amis proches, des lycéens connectés en permanence, il va tout faire pour tenter de discréditer le psy aux yeux de sa mère… jusqu'à commettre l’acte de trop et frôler la folie à son tour.

Lire un extrait

Du même auteur

Plus rien à perdre

Roman
à partir de 13 ans
Avis de lecture

Sables émouvants

Nouvelles
à partir de 13 ans