C'est toi l'architecte : Tadao Ando

C’est toi l’architecte : Tadao Ando invite le lecteur à une partie de tangram géante avec, pour source d’inspiration, le travail du célèbre architecte japonais. L’auteure, Gaia Stella, est connue pour son goût pour la joyeuse danse des formes, mais sa fantaisie est ici limitée par la rigueur des constructions de l’architecte. Comment sensibiliser un jeune public à la poésie et à l’humanisme qui habitent ces grandes structures de béton grises ? Pourquoi pas par un jeu de tangram revisité ?

Cette proposition combine plusieurs niveaux de lecture : sous la simplicité de la mise en scène graphique (personnages et éléments naturels naïfs et stylisés), la plasticienne utilise l’apparente simplicité du travail de Tadao Ando, fait de formes géométriques et de deux matériaux principaux, le béton banché et le verre, pour évoquer la complexité de la réflexion de l’architecte japonais, la complexité du travail architectural, grâce à cette manipulation tout aussi délicate de motifs autocollants, de surcroît de petit format.

De là naît un album-jeu ambitieux mais dont il faudra bien cibler le destinataire, car au-delà du collage des gommettes, l’enjeu est plutôt d’initier les enfants à l’univers de Tadao Ando. D’où un savant dosage entre l’attractivité de la proposition ludique et la composition de l’ouvrage, qui déconstruit paradoxalement la segmentation traditionnelle du documentaire d’information pour, à l’image d’un jeu de cubes, imaginer une autre approche de la connaissance, par association, par correspondance. Exactement ce qui est expliqué du travail de Tadao Ando.

Gaia Stella présente d’abord l’architecte à partir de la déclinaison de ses sources d’inspiration, les voyages, la nature, les personnes, la lumière, le béton banché, et les formes. Une allusion à l’influence de Le Corbusier laisse entrevoir l’inscription de l’architecture dans son époque, car Tadao Ando est bien un architecte de son temps et ses sources d’inspiration en sont la preuve. La maturité nécessaire à la compréhension de ces premiers textes aurait pu suggérer un petit développement à ce propos. 

La plasticienne se concentre ensuite sur la présentation de quelques bâtiments qui illustrent les sources d’inspiration de l’architecte : la nature qui environne et protège, la lumière qui anime et inspire, le béton banché qui est « lisse et doux »^[1], et la fonctionnalité qui fait qu’un bâtiment répond d’abord à un besoin humain. Quelques étapes du travail concret sont également abordées : des considérations d’ordre pratique comme la nécessité des études et des croquis, la réalisation de maquettes en volume, le suivi de la construction ; pour Ando en particulier, la référence à son origine japonaise, et une qualité essentielle pour tout architecte, la persévérance.

La récupération du concept du jeu de tangram pour expliquer la composition des bâtiments, par la manipulation des formes qui le composent, est une façon très concrète d’appréhender l’œuvre surtout lorsque l’enfant est invité à élaborer lui-même une proposition de bâtiment. Mais les stickers la réservent cependant à des enfants déjà habiles et rendent difficile le repositionnement dû aux tâtonnements pourtant nécessaires pour comprendre le travail de l’architecte.

Un album à la fois simple et complexe, à l’image du travail de Tadao Ando et de sa conception du métier d’architecte. Une belle sensibilisation, élaborée et ludique.

^[1] C’est surtout un matériau antisismique, aurait-on pu rappeler, s’il n’est peut-être pas tout à fait écologique.