Chante, Luna

Réédition- Luna, jeune Juive d’origine polonaise, vit avec sa famille à Varsovie. En 1939, les troupes allemandes envahissent la Pologne. On demande aux Juifs de porter l’étoile de David, puis de se regrouper dans un quartier de la ville, qui devient rapidement un ghetto fermé. Luna continue de chanter, soutenue par son père et sa grand-mère. La misère et les persécutions se renforcent, les Allemands encouragent les Juifs à s’installer plus à l’Est. La rumeur court que des camps de mort attendent ceux qui partent. La famille de Luna se décime petit à petit, sa mère, sa grand-mère et ses petits frères sont emportés par la maladie ou les soldats. Luna garde la tête haute, considérant la situation avec optimisme et poésie, malgré tout. Elle entre dans la résistance et est chargée de missions à l’extérieur du mur, grâce à ses cheveux blonds et son air polonais. Alors que la fin est proche, qu’ils ne sont plus qu’une poignée à se cacher, elle chante à pleins poumons l’hymne national juif dans les ruines du ghetto. Bien des années plus tard, elle écrit ce témoignage à sa fille, pour qu’elle sache  « non l’horreur, mais la vie, non le désespoir mais la force mystérieuse qui nous habite, tous, pourvu que nous vivions et que nous le sachions. »

Ce roman aborde le thème difficile du ghetto de Varsovie à travers les yeux d’une jeune fille pleine d’espoir et de passion. Le personnage de Luna habite totalement le récit, transcende à lui seul la terrible réalité. Elle grandit, mûrit sous nos yeux, tandis que les murs du ghetto se ferment, que les gens meurent et sont emmenés dans les trains. Son chant, tel un fil rouge, lui permet de maintenir la tête hors de l’eau.
La grande Histoire, incarnée par des personnages riches et attachants permet au lecteur de prendre la mesure de l’horreur vécue par les Juifs pendant l’holocauste, à taille humaine. D’entrevoir les hommes derrière les grandes dates.
De nombreux détails donnent une épaisseur très réaliste au récit, des scènes révoltantes, sordides sont décrites. Cependant, le personnage de Luna éclaire même la mort « C’est même cette proximité avec la mort qui, parfois, quand la peur lâchait son emprise paralysant, nous faisant sentir l’urgence de la joie ».
L’espoir naît aussi du fait que la narratrice raconte son histoire et l’Histoire à posteriori, avec le regard d’une survivante. On apprend à la fin que ce récit est destiné à son enfant, incarnation de l’avenir.
Un magnifique roman sur l’holocauste, qui permet de voir ce pan de l’Histoire autrement. On en ressort bouleversé, engagé et heureux d’être en vie.