Harry est fou

Dick King-Smith est, avec Roald Dahl, l'un des auteurs britanniques les plus lus, les plus appréciés et les plus traduits. Bien qu'il ait écrit son premier livre pour enfants à l'âge de cinquante-quatre ans, il a trouvé très rapidement un public assidu et a ensuite publié plus d'une soixantaine de romans. L'humour et la tendresse sont toujours présents dans ses textes et les animaux qu'il met en scène sont souvent bien plus malins et sages que les pauvres humains !

Harry est fou est publié pour la première fois en Angleterre en 1984, dans une édition illustrée par Jill Bennett. Gallimard le traduit et le publie dans la collection Folio junior en 1987, et publiera ensuite tous les romans de l'auteur. C'est l'un des livres le plus connus du romancier anglais, avec Babe, le cochon devenu berger. Il met en scène le duo insolite que forment le jeune Harry Holdsworth et son « héritage » venu d'Amérique, un perroquet blanc au bec noir, du nom de Madison. Madison sait parler, ce qui est somme toute assez banal pour un tel volatile, mais il tient de véritables conversations, sensées et érudites, sait jouer aux échecs, possède une culture encyclopédique et un solide bon sens. Un véritable trésor, auquel Harry s'attache très rapidement, qui devient son compagnon et son ami.

La première planche de l'album de Pascal Rabaté : un découpage classique en neuf cases égales. Où l'on fait connaissance avec notre jeune héros, Harry Holdsworth qui apparaît en plan moyen dès la première case et qui s'interroge sur la journée qui commence avant d'entamer une descente fracassante de l'escalier de la maison familiale. Comme tout écolier anglais, il porte un pull en V sur une chemise blanche et une cravate, égayé par une éclatante paire de baskets. Ce matin-là, Harry sème la panique dans l'escalier en réveillant le chat qui dort sur l'une des marches, en ralentissant la descente de son père déjà en retard, en renversant le plateau qu'apporte sa mère pour le petit-déjeuner. Une planche efficace, avec un minimum de texte, très visuelle, basée le mouvement et le réveil. L'atmosphère est plantée, la tonalité des couleurs est douce.
Dans les pages suivantes on fait plus ample connaissance avec toute la famille d'Harry, c'est-à-dire ses parents, le chat et le chien jusqu'à l'arrivée de Madison, dans une cage perchée. On se régale à voir les airs dubitatifs du chat et du chien croqués avec humour par Rabaté lorsque le volatile entre en scène et l'on suit avec énormément de plaisir l'évolution des sentiments qui vont unir Harry, ses parents et Madison. Celui-ci se révèlera extrêmement précieux, parce qu'il sait aussi jouer au Monopoly, répondre au téléphone, lire les recettes de cuisine, résoudre les mots croisés de monsieur Holdsworth et enfin, retrouver son chemin lorsqu'il est enlevé par des méchants. C'est drôle, tout aussi drôle que le roman de King-Smith, tendre et tout en nuances et en finesse. Un régal.

Ajoutons que Pascal Rabaté a de nombreux albums à son actif, dans des genres différents, tous excellents. Les Petits ruisseaux, récemment publié chez Futuropolis, est une merveille ! Il traite avec beaucoup de pudeur et d'intelligence, de ce qu'est la vieillesse et de l'amour entre un homme et une femme âgés. Bienvenue à Jobourg, publié au Seuil, raconte un séjour en Afrique du Sud et constitue un témoignage passionnant de l'ambiance qui règne à Johannesbourg.