Il est où Diouke ?

Il est où Diouke ? Question que se pose le jeune super-héros de la couverture alors qu’un chat est au-dessus de sa tête. Est-ce un jeu de cache-cache ?

Le regard inquiet semble démentir l’hypothèse, immédiatement réfutée par l’entrée en matière. Maman descend de l’escalier, elle a pleuré comme le confirme la mare répandue par terre à ses pieds. L’enfant observe sa mère et perçoit les discours, les démonstrations forcés. Les auteurs alternent les points du vue : la mère parle, l’enfant commente. En discours intérieur, il réagit aux paroles de sa mère par une évocation de Diouke, le super-chat au portrait peu flatteur, valorisé par les bêtises qu’il fait et la complicité avec son jeune maître. L’enfant est peu à peu contaminé par le chagrin de sa maman comme en témoigne ses yeux qui se remplissent d’eau.

Tout à coup le récit s’emballe parce que la maman annonce « Diouke est parti... » ; expression toute faite prise au pied de la lettre.

Et la mère s’embourbe dans une explication farfelue d’échelle pour grimper au ciel. Dans l’univers graphique de Vincent, noir et blanc hachuré de traits qui virevoltent, où rôde la mort masquée, la mère se démène dans une nuisette rayée rigolote et le garçonnet au pyjama de super-héros hésite entre incrédulité et inquiétude d’autant que sa mère fait volte-face, Diouke n’est pas au ciel, il est au centre de la terre !

À ce « délire » maternel, le fils oppose un calme qui la ramène au réel et à l’apaisement : Diouke est mort. Mais il existe dans le sentiment qu’on lui porte. Emilie Boré reprend les éléments inventés par la mère pour construire un récit à hauteur d’enfant, très doux, poétique, qui va les réconforter avant de rejouer la scène du mensonge avec le père.

Un album riche de thèmes divers et ouverts que l'autrice et l'illustrateur exploitent avec drôlerie et subtilité. Le renversement des situations (enfant posé et parents délirants), la peur face à la mort, et la sur réaction des parents qui encombre l’enfant dans sa compréhension de la vie, peuvent amener des discussions entre parents et enfants. La vitalité de l’écriture au plus près de réel, le jeu des illustrations embarquent le lecteur, jeune ou adulte, dans une mise à distance des émotions.

Super récit pour une super BD !