Jacq et Cane fabriquent

Sur un écran noir, deux personnages se toisent : Jacq et Cane, deux marionnettes, profils de carton animés de quelques pièces mécaniques, montées sur un gant dont les doigts permettent l’action. Maîtres d’un grand jeu de Mécanno coloré, ils s’activent pour trier, assembler, articuler, construire un monde baroque plein de surprises et de fantaisie. Marion Bataille, autrice, graphiste, ingénieure papier, illustratrice, réalise aussi des films d’animation dont une série avec Jacq et Cane dans les rôles principaux. Le rythme endiablé, les musiques électroniques pimentent ces saynètes ludiques, propres à enchanter les petits, qui n’auront de cesse de les regarder toujours et encore.

L’album est construit sur le même modèle, et permettra aux jeunes lecteurs et lectrices de chantonner eux-mêmes sur les images qu’ils feront défiler à leur propre rythme, nommant aussi les différentes étapes du jeu mis en scène par la plasticienne. Dans un célèbre abécédaire en 3D Marion Bataille imaginait un ingénieux système de tirettes pour que certaines lettres se transforment en d’autres lorsqu’on tourne les pages[1], pop-up délicat et magique. L’artiste utilise ici un jeu de pièces inspirées du Mécanno, présentées en introduction et qu’elle décline sur le fond noir, très évocateur du cinéma, composant des motifs figuratifs sur un mode poétique, animé par le jeu des gants, blancs comme ceux du mime Marceau.

Les assemblages composent des représentations minimalistes de la vie quotidienne de l’enfant, y compris les moments d’ennui, quand l’horloge égrène les minutes avant l’heure du jeu. Quand elle arrive, le compte à rebours incite au voisement, 4, 3, 2,1, avant le départ signifié par un encadrement jaune et étoilé, tout en angles aigus, dynamique et de fait, retentissant : une démonstration que la lecture, oui, c’est vivant !

L’image est si explicite et inspirée qu’elle se passerait des textes, et l’enfant captivé fera lui-même son petit cinéma en plongeant dans cet album unique et désopilant !

[1]ABC3D, Albin Michel Jeunesse, 2008.