J'habite une famille

Pour élever un enfant, il faut tout un village dit un proverbe africain. Telle peut être la morale de cet album sensible de Séverine Vidal et Sophie Vissière, ouvert à la réalité familiale des enfants d’aujourd’hui.

J’habite une famille. Un beau titre, bien trouvé, tant il est vrai que pour l’enfant, la famille matrice est un espace où il s’inscrit, grandit. La narratrice part du plus proche, sa mère et son frère, une « famille minuscule », dans un joli pavillon avec linge au vent et chat sur le mur, une famille idéale en quelque sorte. Oui mais où est le papa ?

Ailleurs, dans un appartement, avec une autre femme, une « belle-mère » pour elle. Mais pas de sous-entendu cruel comme dans les contes. Prudence, la compagne de son père, symbolise les modèles familiaux qui bougent. Elle a adopté deux enfants et en attend un autre.

Notre héroïne qui parlait d’une famille minuscule se retrouve avec une fratrie de quatre enfants. Séverine Vidal a pris soin d’envisager tous les possibles, vrai frère, demi-frère ou sœur, enfants d’un autre lit… et son héroïne affirme tranquillement que tous peuvent cohabiter, vivre ensemble même si de temps en temps « ils m’énervent un peu ». Cette diversité s’applique aux grands-parents, proches, éloignés, réels, par mariage ou d’adoption comme le vieux voisin qui s’occupe d’elle.

La structure malicieuse du récit part du faussement simple « une famille minuscule » pour jouer le foisonnement. L’amoureux de Maman, la famille éloignée des tantes « fées », des cousins, cousines tous se retrouvent sous l’arbre des grandes tables familiales. Cette vision optimiste est soutenue par l’illustration tout en nuances de Sophie Vissière qui crée une atmosphère chaleureuse, apaisée. Un bon album pour parler de la complexité familiale et mettre à distance des situations parfois bien compliquées ou douloureuses.