Kafka et la poupée

Kafka et la poupée raconte l’histoire vraie très touchante d’un événement survenu en 1923, la dernière année de vie de Franz Kafka. Alors que le célèbre écrivain tchèque souffre de tuberculose, il croise par hasard dans un parc berlinois une petite fille pleurant à cause de sa poupée perdue. Pris d’émotion, il lui raconte que sa poupée est partie en voyage et dans les semaines qui suivent lui écrit une série de lettres envoyées de sa part.

L’autrice américaine Larissa Theule a donc eu la bonne idée de s’emparer de cette anecdote pour en faire un album au texte très riche et tout en retenue. Les dialogues engagés entre un Kafka très empathique et la petite fille Irma (qui dans la réalité n’a jamais été retrouvée) alternent avec les lettres postées par sa poupée Soupsy, traitées avec un graphisme particulier. Un troisième personnage apparaît également : Dora Diamant, le grand amour de Kafka dans les dernières années de sa vie. Les dessins de Rebecca Green sur papier ivoire, à la palette sobre et aux larges contours noirs, apportent une touche à la fois rétro et très moderne.

Dans ce bel album, paru initialement en 2021 et ici traduit de l’anglais aux éditions des Éléphants, le lecteur mesure ainsi la puissance de l’imaginaire. À partir d’un simple objet perdu, s’ouvre tout un champ d’aventures ; elles nous emmènent au sommet des montagnes, au Maroc et jusqu’aux confins de l’Antarctique. La question du temps qui passe (on est confronté à l’enfant qui grandit et à la mort, celle de Kafka en l’occurrence), est également très présente et abordée avec une grande douceur, à travers les absences de Kafka et les lettres de Soupsy, de plus en plus courtes. À la fin de l’ouvrage, une postface et une courte biographie apportent au lecteur un complément d’informations très précieux sur le contexte historique.