Kurt quo vadis ?

Quo vadis ? Où vas-tu ? C’est bien la question que se pose l’inénarrable Kurt dans ce troisième tome de ses tribulations. Le métier de conducteur de chariot élévateur lui paraît bien fade au regard des amis d’Anne-Lise, architectes ou docteurs doués. Une voyante lui ayant prédit un avenir en relation avec de la poussière, Kurt entreprend de nettoyer le monde avec un aspirateur. Il va jusqu’à dépasser les frontières norvégiennes, accompagné de son jeune fils Bud. Comme leur initiative est souvent mal comprise, ils arrêtent et deviennent alors de faux médecins. Bientôt percés à jour, ils finissent par revenir à la maison. Et c’est finalement son chariot élévateur qui permettra à Kurt, dans la poussière de gravats, de « laisser une trace » héroïque sur la planète…
Avec son immense naïveté, qu’on aurait tort de prendre pour de la bêtise, Kurt soulève toujours un problème existentiel. Les courts ouvrages de la série d’Erlend Loe confinent à la philosophie la plus universelle, pour le bonheur et la réflexion des grands comme des petits. Ces derniers seront de toute façon de nouveau séduits par l’humour absurde et loufoque, les illustrations noir et blanc primaires (ah, les moustaches de Kurt !). Le narrateur qui suit le héros fait semblant d’adopter son point de vue et son ton bonhomme, devenant par là un personnage à part entière, un commentateur amusant. Rempli de bonne volonté, il encourage Kurt dans un petit poème : « Relève la tête, Kurt, toi qui es preste et gentil ! » (p. 5). En effet, Kurt, à la recherche de lui-même, se révèle assez malheureux dans ce tome. Profondément humain et complexe, Kurt, c’est finalement chacun de nous…