La jeune fille, le loup et la forêt

La jeune fille, le loup et la forêt, trois éléments inséparables du Petit Chaperon Rouge traités par Giovanna Ranaldi avec l’austérité et la dramatisation des trois couleurs dominantes, le rouge, le noir et le gris. L’atmosphère de l’album est pleine de contrastes. Il y a aussi la délicatesse de la dentelle pour certains décors de fleurs, la finesse du trait qui esquisse les silhouettes – celles du loup ou du Chaperon – et donne le mouvement – celui qui se faufile à travers le noir délavé des paysages – ou encore les formes massives, presque abstraites, des hauts fûts d’arbres. La tension dramatique va croissant : la petite fille s’avance vers la maison ; la répétition du motif rouge sur le fond noir profond installe une certaine inquiétude, alors que la fillette semble bien innocente. Face à elle, avec la même technique de la répétition du motif, le loup. Quand se produit la rencontre entre le loup et la petite, il n’y a pas de confrontation : on attendait le choc, or la fillette poursuit son chemin dans l’allégresse des fleurs, des oiseaux et du cerf bondissant. Mais ce n’est qu’un répit plombé par la forêt sombre et l’échange des regards entre le loup et un autre regard énigmatique, vu à travers une meurtrière, celui de Mère-Grand ? Dans ce tête à tête intense, qui gagne ? Pourquoi surgit un chasseur qui lève des vols d’oiseaux et déclenche la course du loup ? Comment comprendre la mélancolique jeune fille au bonnet rouge couchée ? Un rendez-vous attendu et manqué ? On peut le croire en regardant la forêt d’ombre pluvieuse.

Un livre mystérieux et attachant où rien ne se résout. L’atmosphère pèse et on joue à reconnaître le conte de Perrault tout en appréciant les différences. Un plaisir subtil où, à la fin, seule la griffe du loup subsiste...