La société des S

Ari, une adolescente précoce, vit cloîtrée dans un manoir, en compagnie de son père, Raphael Montero. Celui-ci est végétarien et souffre d’une maladie de peau, du moins, c’est ce qu’il affirme. Il a aussi expliqué à Ari, très laconiquement, que sa mère les avait abandonnés après sa naissance. Ari ne va pas au lycée, son père se charge seul de son éducation. Elle lit des livres, beaucoup. Ce sont ses refuges. Pourtant, un soir, Ari est invitée à dîner chez sa gouvernante et se rend compte que la vie peut être autrement, et que son enfance a été bien singulière. Elle sympathise avec les enfants de cette dernière, et partage, un temps, leurs loisirs et leurs sorties. C’est en voyant avec eux un film de vampires qu’Ari entrevoit la vérité. Si son père lui avait menti depuis treize ans ? S’il n’était pas le simple mortel qu’il prétend être ? S’il était un vampire ?
Pour étayer cette hypothèse dérangeante, Ari quitte seule le manoir pour tenter de retrouver sa mère. Elle a quelques pistes et entreprend un long voyage sur le Sud des Etats-Unis. Les réponses qu’elle trouvera là-bas, au terme de son périple solitaire et de rencontres, la réconfortent et la perturbent aussi. Mais c’est à ce prix qu’elle trouvera qui elle est vraiment.
Ce roman est le premier d’une trilogie et il est excellent, renouvelant avec une élégance constante, le genre très exploité et parfois aussi éculé, de la littérature vampirique. C’est avant tout un roman initiatique, porté par une jeune héroïne en proie à des questionnements douloureux et essentiels. Le chemin qu’elle entreprend, seule, pour connaître enfin la vérité, lui ouvre des portes, lui fait aussi comprendre que le monde clos qu’elle a toujours connu, n’est pas le seul, que d’autres possibles existent et que c’est à elle de choisir. Les trois personnages principaux, Ari, son père, et sa mère, que l’on découvre dans la deuxième partie du récit, sont denses, complexes, en proie à des désirs et des aspirations parfois contradictoires.
Saluons aussi la qualité de l’écriture, toujours soignée et fluide, et le choix, toujours judicieux et éclairant, des références littéraires et philosophes que propose l’auteure à notre réflexion.
On entre, avec grand plaisir, dans ce beau roman envoûtant, d’une réelle profondeur.
L’école des loisirs cède rarement aux modes littéraires et publie très peu de romans consacrés aux héros du moment, les vampires. Avec « La société des S », elle fait là un choix exigeant.