Mais quel est donc cet inconnu qui sème les couronnes sur la double page d’introduction de ce récit ? Elles tombent de sa carriole, au hasard des cahots du chemin, et avant même que la narration ne démarre, c’est sur cette dégringolade scintillante que s’arrête l’œil du lecteur. Le titre semble annoncer un conte comme ceux de Madame d’Aulnoy, où les animaux sont les héros, malheureux humains métamorphosés, comme dans la mythologie grecque. Le dessin d’une plasticienne, nouvelle venue dans le monde de l’illustration jeunesse, Dena Seiferling, est tout à fait enchanteur : au crayon couleur sépia avec des contours estompés comme des auréoles, l’ensemble a un aspect irréel qui concourt à créer une atmosphère féérique.

C’est une petite souris qui émerge sur le devant de la page, un peu étourdie, plutôt affamée, et elle ne trouve qu’un drôle d’objet dont elle ne sait que faire, avant de l’essayer comme couvre-chef. C’est son compère l’ours qui va lui donner son sens : c’est une couronne, et une couronne, ça signe un roi ! Le corbeau et le renard, la tortue, sans son lièvre, tous les animaux alentours se pressent comme des courtisans affables, et la souris, ma foi, se prête au jeu. Quand survient un serpent couronné lui aussi, tous l’acclament, après le roi, voici une reine. Seule la souris s’inquiète... Est-ce la soudaine concurrence ? Ou le péril de côtoyer de si près un prédateur ?

Tous ces personnages d’un fablier malicieusement revisité par Cary Fagan, auteur canadien reconnu, ne sont ni enchantés ni magiciens, on attendra en vain les jeteurs de sorts. Ils sont compères et camarades, prêts à souscrire à la fantaisie d’un moment magique, sorti d’un conte, par le petit miracle de ces mignonnes couronnes semées au vent innocent. Et l’illusion du pouvoir cette fois ne détrônera pas l’amitié, seule véritable puissance qui les unit. Une belle histoire dans la tradition littéraire anglo-saxonne des récits animaliers, de Beatrix Potter à Dick King-Smith en passant par Kenneth Grahame, parfaitement harmonisée grâce à l’accord entre un écrivain-conteur et une illustratrice inspirée.

Véronique Cavallasca

Présentation par l'éditeur

Il était une forêt dans laquelle, un beau jour, une toute petite souris poussée par la faim découvrit une toute petite couronne. Elle qui n'avait jamais rien vu de tel fut d'abord surprise, avant de la placer sur sa tête. Et oh, miracle ! La couronne lui allait à ravir… Tant et si bien que lorsqu'un ours vint à croiser le rongeur et qu'il lui demanda s'il était un roi, que répondit la souris ? «

Un conte qui parle du jeu des apparences, de l'ivresse du pouvoir et de la beauté des choses simples, simples comme un bouquet de pissenlits offert par un ami.

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