La vie à mille décibels

A presque seize ans, Grace vit ses émotions comme démultipliées.Tout contact avec l'autre prend des proportions intenses (en positif ou en négatif) et seuls la routine et son chez-elle rassurent la jeune fille. Elle est atteinte du trouble autistique d'Asperger, socialement handicapant mais qu'elle parvient à cacher au prix d'efforts quotidiens. Alors que son père est parti en reportage, que sa mère fait le bilan de sa vie et que sa petite sœur devient adolescente, Grace rencontre Gabe, garçon patient et amoureux. Elle décide de s'envoler pour la vie adulte, quitte à faire des erreurs…

L'auteure et sa fille sont elles-mêmes atteintes du syndrome d'Asperger, à la fois léger pour le regard des autres et usant pour celui qui en souffre. La narration en « je » de Grace ne diffère pas vraiment de celle d'une jeune fille comme les autres, si ce n'est de courts passages où elle explicite sa sensation d'être « à côté » de ce qui est attendu, ou des malaises physiques en situation de difficulté, de changement inopiné. Le caractère supposé exubérant de l'héroïne se comprend lui très bien au regard de l'adolescence, temps des bouleversements. De même, les relations privilégiées entretenues avec une meilleure amie, avec un animal (la jument Mabel) peuvent correspondre aux élans passionnés de cet âge. Il ne s'agit pas ici de minimiser le handicap, mais de le remettre à sa juste place : il est possible de vivre heureux en étant différent. Au final, Grace compose un personnage profondément attachant, et le roman (du quotidien) se lit avec un joli plaisir.