Le tout petit jardinier

Un tout petit jardinier de quelques centimètres s'active presque seul, avec son ver apprivoisé. Sa tâche est immense dans ce grand carré vert, mais il garde courage, car il en va de sa survie : il mange à partir du jardin, il dort dans le jardin, il existe presque par le jardin. De fait, après un grand coup de collier qui n'a rien donné, le jardinier et son ver s'étiolent en même temps que les tendres feuilles.

Mais une fleur, un beau dahlia rouge, fait exploser ses couleurs. Cela suffit pour un jeune garçon (humain) : il mobilise ses amis et retape non seulement l'espace de verdure, mais la maison posée au milieu. Fleurs, arbres, arbustes et potager rivalisent de beauté. Longtemps après, le tout petit jardinier se réveille et reprend alors ses activités, un large sourire aux lèvres.

D'Emily Hughes, on avait aimé Sauvage, fillette éprise d'harmonie avec la nature, comme le petit jardinier d'ailleurs. Mais tout seul, on ne fait pas grand-chose, nous dit cet album bâti sur l'idée d'une solidarité invisible (jamais le tout petit jardinier et les enfants, aux visages d'ailleurs cachés, ne se rencontrent).

Les illustrations aux tons verts foisonnent, les feuilles et les tiges s'entortillent, les fleurs fusent vers le ciel. Emily Hughes aime le détail, allant jusqu'à créer une histoire parallèle avec le ver de terre, lui aussi moribond, renaissant avec une compagne et des petits.

Et le texte, serein malgré la tragédie, défile en bas de page, captivant le lecteur avide de connaître la fin. En fait, il n'y en a pas vraiment, cycle des saisons oblige... Un livre cocon qui donne envie non de se réfugier loin de tout, mais au contraire de vivre avec bonheur.