Les princes charmants n'existent pas

Pas contente de son physique, fan d'Ava Gardner et éprise d'absolu romantique, Nora trouve une lettre de rupture amoureuse, destinée à son jeune voisin. La jeune fille prend alors sa plume et entame, sans vraiment s'en rendre compte elle-même, une correspondance avec Rodrigue. Elle incite le pragmatique jeune homme au choix des mots et au vouvoiement. Sa meilleure amie Julie l'encourage au contraire à prendre contact, et Rodrigue finit lui aussi par s'impatienter. Mais voilà, Julie a peur de se confronter à la réalité.

A l'heure des réseaux sociaux et des relations kleenex, Nora détonne, quoique toutes ses raisons ne soient pas avouables : la crainte des autres l'inhibe complètement, et elle préfère les gros pulls informes aux séances de shopping. A l'intérieur du roman, il est question de Choderlos de Laclos (les lettres), de Musset (le badinage), mais aussi d'anorexie, de divorce parental et de petit ami trop pressant – celui de la gentille Julie -. Le mélange très contemporain séduit, les échanges épistolaires sont entrecoupés de scènes bien vivantes.
Paradoxalement, l'intrigue tourne autour d'un mini-drame concernant Julie et non Nora, dont l'histoire file davantage au fil des pages sans évoluer de longtemps. Le lecteur s'approprie très vite l'histoire rythmée ; heureusement, car l'ensemble aurait pu sembler sinon assez long, à l'image des chapitres 22 et 23 entièrement composés de lettres certes bien écrites, mais plutôt répétitives. Astucieux, Les princes charmants n'existent pas voit donc éclore une jeune fille à l'adolescence, tout en promettant de lancer la mode des échanges postaux, comme dans le collège des héroïnes. Qui a dit « désuet » a tort !