Li Na et l'Empereur

Avec Li Na et l'empereur Andréa Liebers et Silke Tessmer nous plongent dans les mystères de l'Asie, qui souvent peuvent être universels. Li Na est une vieille femme à l'étrange pouvoir, celui de saisir avec son pinceau des sentiments, des sensations indicibles et imperceptibles. Calligraphe de renom, le travail de Li Na consiste à s'imprégner de ce qui l'entoure. L'effluve d'une fleur, par exemple, pour mieux en relater, par un idéogramme, toute le quintessence. Chaque jour, accompagnée de sa jeune élève San Li, elle tente de décrire la nature et l'univers.

Un matin, l'empereur se rend chez la vieille calligraphe avec une demande pressante et étrange ; il exige l'acquisition du signe du pouvoir.

Devant une telle demande, Li Na demande du temps pour éprouver et tracer au plus juste ce sentiment dont elle ignore tout. De semaine en semaine, la calligraphe repousse l'échéance, rien n'y fait, pas même le prêt d'objet appartenant à l'empereur. Impatient, l'empereur fulmine devant cette résistance.

Modestement, Li Na tente pourtant de s'atteler à sa tache et lorsque l'empereur arrive à l'improviste chez elle, le signe est tracé. Pourtant ce signe éclabousse par sa violence, son aridité. Satisfait, l'empereur repart chez lui, muni de la précieuse calligraphie, qui ne tarde pas à agir sur lui. Déboussolé par l'image de sa propre puissance, l'empereur s'écroule et pleure. Le conte s'achève par une leçon voilée, Li Na tracera devant sa jeune élève le signe de la vérité.

Un très bel album qui conjugue la simplicité d'une histoire bien écrite et la sobriété des images. Quoique linéaire, ce conte laisse une grande part à l'imaginaire. Tout semble esquissé, effleuré, comme tracé par la pinceau de la vieille calligraphe. Chaque tracé est souligné en noir, comme pour rappeler les idéogrammes. Peu de couleurs sont employées, ce qui procure un univers plastique distinctif et fort. Une belle réussite pour cet album à lire aux petits comme aux grands.

E.A.