Ma famille méli mêlée

Comment expliquer les liens de parenté, comment expliquer les métissages, la généalogie ? Ma famille méli mêlée d’Aurélia Gaud apporte une réponse convaincante.

Avec un langage d’une extrême simplicité, elle présente les premiers personnages : « Voici mon papi et ma mamie ». Le style direct, le ton badin et enfantin installent une connivence entre le narrateur et le lecteur qui découvre les grands-parents. Ils sont un peu austères, comme les figures figées de quilles ou de totems. De peau « noire », ils portent de beaux habits en tissu africain. Ce portrait hiératique laisse place à une évocation bien trouvée : « un jour [ils] se sont rencontrés, aimés... méli-mêlés… ». L’illustration apporte la preuve, les corps se rapprochent, les regards se croisent, les tissus s’emmêlent, « et voici un… » enfant, puis deux, puis trois ! La malice se cache dans la mise en page, les enfants entre les parents sont constitués par un fragment du vêtement de l’un, un fragment de celui de l’autre. Les filles ont des courbes, les garçons sont rectangulaires (ou presque).

Le narrateur passe ensuite à Papou et Mamita dans la même figuration stricte, avec comme seule différence les tissus et la couleur de peau. Papou et Mamita sont « blancs » et rejouent exactement le même scénario « méli-mêlé » avec le même résultat… ou presque ! Deux beaux enfants seulement, deux garçons bien droits aux pantalons rayés.

La fille aînée de Papi et Mamie, et le fils aîné de Papou et Mamita « se sont rencontrés, aimés » et « youp’là, me voilà ! » : c’est notre narrateur. Un peu plus clair que sa mère, il porte un vêtement qui mélange les tissus portés par chacun de ses parents, métissé et rayonnant d’autant plus qu’il attend une petite sœur qu’il imagine au travers de multiples combinaisons possibles.

Dans son extrême simplicité langagière, sa vivacité, la métaphore visuelle de la poupée distinguée par le tissu, l’autrice-illustratrice exemplifie de façon très pertinente la difficile figuration de la généalogie. L’enfant peut suivre les personnages, les identifier dans la fresque finale où, au-delà des seuls grands-parents s’adjoignent aussi les oncles, tantes, cousins, sans oublier les familles recomposées. Un livre sympathique et chaleureux pour aborder la filiation et le métissage pas toujours bien vécu.