Soixante choses impossibles à faire avant le déjeuner

Soixante choses impossibles à faire avant le déjeuner se présente comme un recueil saugrenu d’interrogations successives, sans queue ni tête. L’auteure nous prévient que ces questions sont presque toutes sans réponse. Malgré les apparences ces propositions s’organisent autour de quelques grands thèmes. Au début et à la fin, la question existentielle de l’œuf et de la poule se pose, dans un dialogue vif, tant et si bien que l’œuf devient poussin, est-ce une réponse ? Celle de l’humour anglais. Il triomphe dans les questions et dans les réponses graphiques, nerveusement et rigoureusement dessinées. Parmi les choses impossibles, nous trouvons, des expressions à prendre au pied de la lettre. Exemple : trouver une aiguille dans une botte de foin, dans la mise en images, l’aiguille n’est pas retrouvée, l’auteure offre donc celle de sa boite à couture ! Détourner le problème en guise de réponse, Harriet Russelll s’y entend. Autres figures de l’impossible, cube, glace en feu, léopard qui change de taches ; arbres à crayon , à briques… que la création graphique rend étrange mais possible : un brique plantée « dans la terre » donne sans problème, sur le papier, une maison et le ballon tient parfaitement en équilibre sur la pointe d’un couteau ! Un des grands plaisirs de cet album tient dans la liberté affirmée par la créatrice de rendre visible l’impossible en jouant sur la figuration et la réalité. Par exemple, grand / petit, libre à elle de représenter en grand, le petit scarabée et en petit, le gros éléphant ; de déjouer le réel et d’introduire l’imaginaire, le léopard ne change pas de taches mais l’illustrateur peut figurer la robe du léopard animée par des étoiles, des carrés, des ronds…dessiner une très grosse sauterelle ou toute petite montagne et mettre à égalité lune et balle de tennis. Enfin, elle s’attache déréaliser des représentations courantes : un verre à moitié vide ou à moitié plein se représente le plus souvent par un ligne horizontale conforme à la réalité. Déshabituer le regard et la pensée c’est le montrer verticalement. Un album surprenant qui ouvre des chemins buissonniers pour s’amuser, réfléchir … si on est sensible à l’humour !