Une ombre qui glisse

Dans un album particulier, très esthétique, le narrateur, un petit garçon raconte sa grande sœur Sara.
Sara, si singulière, qui se faufile et passe comme une ombre dans la maison.
Le regard que ce petit frère pose sur elle, sans concession, laisse libre cours à son impatience et à ses désillusions, dit son incompréhension, se décourage parfois mais aussi s’émerveille du bonheur simple qui s’offre dans la spontanéité et la complicité de l’enfance.
Dans des compositions joliment anecdotiques où le dehors interagit avec l’intime, la présence récurrente et emmurée de Sara témoigne d’un monde différent, énigmatique, imprévisible qui se construit et s’élabore finement.
Les camaïeux de teintes délavées font écho à un texte délicat et sobre sur la solitude et l’autisme.
Belle déclinaison de tonalités défraichies, qui évoque le passage lent du temps par un immobilisme déconcertant, métaphorise l’exil intérieur et l’incapacité de communiquer par la présence de formes humaines juste esquissées, planes, comme si la vie se déroulait ailleurs, alors que les espaces alentours s’animent vivants et colorés.
Une ombre qui glisse, un murmure qui s’étire, une vie autrement tracée, dans l’absence de sensiblerie, que soutient la fragile omniprésence d’ornements floraux, comme une trame fine et transparente, un voile captant la lumière de la vie.