Contes de Grimm

Les contes de Grimm par Philip Pullman, quelle drôle d'idée.
De nombreux illustrateurs se sont essayé (avec plus ou moins de succès) à la mise en images des contes populaires, il existe aussi de nombreuses versions de tel ou tel conte simplifié, adapté, remis au goût du jour. La version de Philip Pullman va bien au-delà d'un travail narcissique et auto-satisfaisant ; en premier lieu parce qu'il s'attelle à la rédaction de pas moins de 50 contes, ensuite parce qu'il fait un véritable travail de chercheur puis de conteur.
Dans son introduction il fait un bref rappel de ce qui fait un conte, la structure narrative linéaire, la chronologie rapide, la simplicité des personnages (gentils ou méchants), le peu d'imagerie ou de description. Cela étant posé, Pullman rappelle le droit de chacun à s'approprier les contes en y étant plus ou moins fidèle. Il dit enfin le plaisir le pouvoir raconter sans devoir inventer puisque la trame est là. Il ne reste plus à l'auteur qu'à chercher la clarté en laissant le moins possible d'empreinte stylistique.
À la lecture de ces contes, on ne peut que se réjouir ; Philippe Pullman (et son traducteur Jean Esch) ont fait un travail magnifique, les textes sont simples et clairs, le vocabulaire précis, le rythme est soutenu. Certaines versions sont agréablement surprenantes. Dans le Roi Crapaud, par exemple, ce n'est pas un baiser de la princesse qui défait le sort : le crapaud se transforme en prince après que la princesse a accepté, très à contrecœur, de le faire monter dans son lit et l'a lancé contre le mur parce qu'il voulait dormir sur son oreiller !
À la fin de chaque conte, Pullman rajoute un commentaire incluant la classification du conte, la version qu'il a choisie, parfois des explications sur la symbolique ou sur l'évolution du conte.
Shaun Tan, quant à lui, plutôt que d'illustrer les contes, a choisi de faire une sorte d'exposition de la quintessence de l'imagerie des contes de Grimm sous la forme de petites figurines inspirées des sculptures inuits ou précolombiennes. Ce petit musée pourrait à lui seul inspirer un nouveau conte, raconter une nouvelle histoire : un travail de maître.