Automne

Nanna a douze ans, sa petite sœur Fride six. Elles n'ont quasiment connu que la vie dans le bunker souterrain d'une maison sur une petite île, en compagnie de leur père. La famille a quitté la métropole alors que Fride était encore bébé, fuyant une épidémie qui a complètement ravagé la flore et la faune, rasé les humains de la carte. Mais aujourd'hui, la nourriture manque, et le père des filles tombe malade. Il les envoie alors vers la grande ville, afin de trouver des médicaments. Nanna et Fride, excédées de rester enfermées, sont d'abord heureuses de découvrir la liberté, le grand air. A l'issue de quelques rencontres, elles en comprennent aussi les dangers...
Il y a menace de mort, mais Nanna et Fride ne renoncent pas à leur curiosité. Il y a urgence, mais elles prennent le temps de se lier avec Oiseau, un drôle de jeune garçon abandonné. Les personnages sont des enfants, prêts à tout car inconscients, offrant des options narratives qu'un adulte n'aurait pas permises. Nanna protège certes sa petite sœur, et, riche de souvenirs d'avant l'épidémie, elle fait preuve de sens pratique dans cette ville abandonnée. Elle a cependant besoin de l'innocence pleine d'espoir de Fride : la fillette est persuadée dès le départ de retrouver leur mère, médecin mobilisé sur place à l'époque, et cela se révélera juste.

Le lecteur ne saura pas grand chose des origines de cette « fin du monde », ni même d'un avenir complètement ouvert, car l'important réside dans la survie au jour le jour. Factuel, le roman n'est cependant pas dénué d'une sensibilité qui se glisse entre les phrases, se traduit par un geste affectueux, un moment de pause, etc. Beaucoup se joue dans l'atmosphère, lente et presque lancinante, jouant avec les ellipses. L'effet produit est extrêmement étonnant, mais beaucoup plus réaliste (et donc effrayant) que des poursuites de morts-vivants sanguinolents. La nature ne parle pas, elle agit... Impeccablement écrit et traduit, doté d'une couverture magnifique de Stian Hole, Automne s'affirme tranquillement en tant que beau roman sage : il n'en cache pas moins des profondeurs vertigineuses quant à notre place sur terre.