Histoires de vent et de sable : contes touaregs

L’auteure, Véronique Lagny Delatour, se présente comme curieuse des mémoires du monde. Elle collecte un trésor de patrimoine oral dans une édition soignée où texte et illustrations empruntent des éléments graphiques aux pays (Maroc, Liban, Roumanie, Chine…) ainsi racontés. Dans le recueil touareg, 25 contes sont rassemblés. Ils parlent de la vie dans le désert, autour du puits, de la soif, près de l’oued. Ils racontent les réalités sociales des vengeances entre oncle et neveu-esclave. Lorsqu’il est question des rapports mari et femme, ils n’ont parfois rien à envier à certains contes moyenâgeux et la femme a les mêmes armes de ruse face à des réalités rudes (L’homme qui avait épousé une femme trop belle). La majorité des contes présentés sont des contes animaliers. Tout un bestiaire « exotique » se déploie : chacal, guépard et lion mais aussi cheval, l’animal respecté, l’âne, le lapin ! Les fonctions des animaux ressemblent à celles des contes de chez nous et tous ensemble jouent une comédie humaine. Entre eux naissent des alliances fragiles et des pouvoirs usurpés : au retour de la chasse, le lion, en raison de sa force, prend le buffle et laisse le lapin au guépard et au chacal… C’est la loi du plus fort. Nous y lisons aussi des contes d’origine : celles des oasis, nées d’une fourberie du chacal qui fait travailler pour lui le chameau et chasse le lion et le chameau du petit paradis ainsi créé.

Florilège de sentiments et de formes, ces contes recèlent de belles histoires tristes d’amitié et de vie à la mort entre lionceau et veau : les mères, lionne et vache, sont amies jusqu’au jour où la lionne mange la vache. La lionne refuse de nourrir le veau. Le lionceau tue sa mère mais peine perdue, par manque de nourriture le veau meurt. Inconsolable, le lionceau meurt à côté de lui. Autre exemple, le superbe texte final, Bassir enfant trouvé, appelé selon le cas, est le Clairvoyant ou le Paresseux, est celui qui apprend à lire dans les arbres et dans les gens !
S’ajoutent au charme de ce recueil , les illustrations dessinées comme des arabesques, des tatouages. Dans le dédale du trait fin, se cache une dimension caricaturale amusante. Raffinement ultime, la délicatesse de la pagination incluse dans un motif de tapis berbère nous invite à nous asseoir. Un beau voyage.