Le Kraspek

« Au temps où le tsar était tsar »… Oleg est enrôlé dans l’armée contre sa volonté. Pauvre, il part, pauvre, il reste. Seul, sans le sou, à quoi bon vivre ? Au tout dernier moment, un diable l’arrête avant son suicide. Un pacte se noue : le diable assure à Oleg le bien-être et l’aisance financière en échange d’une période de quinze ans sans aucun soin de lui. Ni peigne, ni rasoir, ni lavage… Avec l’argent dont il jouit raisonnablement, le Kraspek vit heureux, il aide chacun et sa saleté n’est rien à côté de la misère passée, d’autant qu’il s’attire l’affection de tous ceux qui vivent difficilement. Il acquiert ainsi une grande renommée à tel point que le tsar ruiné lui demande de l’argent pour armer ses bataillons. Voilà le tsar obligé du Kraspek, en échange… ? Ce conte d’Afanassiev a tout le charme des contes populaires russes. Il plonge dans la dure réalité de la petite paysannerie, contrainte et malmenée. Il glorifie les ermites russes qui deviennent saints comme Basile le Bienheureux, et il utilise les ressources du conte de sagesse dans le pacte avec le diable qu’Oleg détourne à son profit quoique la roublardise du diable rétablisse un peu l’équilibre. L’illustration joue la naïveté, chaque page est encadrée par une frise à la manière des armoiries – on y trouve des chapelets aussi bien que des outils ou des roses selon le texte -, autour d’un dessin central coloré et enfantin. Les traits grossiers, l’aspect statique, la maladresse des personnages installent une simplicité extrême entre humour et compassion. Une belle histoire, une lumineuse entrée dans l’âme russe.