Muléum

Julie, 18 ans, a perdu ses parents et son frère dans un accident d’avion en Afrique et vit désormais seule dans la grande maison d’Oslo, sans problèmes d’argent. Elle a de sérieux doutes sur son envie de vivre. Elle décide de se suicider mais peine à trouver le bon moyen… Elle sillonne la planète en avion, se sentant ainsi plus proche de ses parents et préparant son Grand Vol.
Le décalé, pour ne pas dire déjanté, auteur norvégien du petit Kurt (La Joie de lire) semble aborder des rivages plus sérieux avec un roman consacré entièrement au suicide et à des réflexions sur la mort, l’existence d’un dieu, les éventuels signes annonciateurs d’un destin… Par le miracle de son talent, il parvient à rendre le texte non seulement captivant, mais aussi très drôle. La narratrice Julie - dont on lit le journal - effectue un périple qui l’amène, en vrac, à tomber enceinte d’un champion de patinage japonais, écrire un livre vulgaire sur les malheurs d’une dénommée Solfrid, courir la nuit dans des villes inconnues, devenir rédactrice en chef du journal Le Suicidant, etc, etc. Les personnages secondaires sont vus à travers ses opinions et composent un kaléidoscope loufoque : le Docteur Dingo (son psychologue), son amie la naïve Constance, le stoïque homme à tout faire Krzysztof. Julie rate plusieurs fois ses tentatives de suicide, pour finir enfin par prendre une décision que je vous laisse découvrir. Derrière l’humour absurde se cache constamment l’émotion, et l’héroïne se souvient avec tristesse d’épisodes en compagnie de son frère Tom, sa mère un petit peu, son père surtout. Elle confie, mais uniquement au journal, être bouleversée, perdue, aimer l’anonymat des aéroports, rechercher le rythme effréné des avions qui l’empêche de penser. Muléum (en fait une déformation de « muséum » par la narratrice enfant) est, à l’image de Kurt, léger en surface pour mieux cacher sa profondeur et sa sensibilité…