Kaléidoscopages
L'avis de Ricochet
Kaléidoscopages : ce mot-valise entre (se) télescoper et kaléidoscope rend compte du jeu où nous entraîne Delphine Perret au fil des pages. La rencontre de plusieurs formes ou couleurs produit d’autres formes qui « racontent » d’autres histoires… et c’est éblouissant !
Soit un point, deux points, « quelqu’un » : il suffit de glisser, sous les deux points, une petite ligne courbe et alors s’esquisse un sourire. Une myriade de points, serrés sur la page blanche, c’est la foule ; une collection de points, un peu effacés, comme éloignés, « le ciel » se déploie.
Le rapport texte/images se rit de cette simplicité et de cette fausse redondance. Cette collection de points, est-ce vraiment la carte du ciel ? Peu importe, lorsque c’est écrit, nous décollons !
Le jeu est lancé, il s’agit de le poursuivre avec d’autres armes : la ligne par exemple. Soit un fragment de ligne verticale, c’est 1 ; avec une oblique c’est 2 ; 9 fragments assemblés c’est presque un cube ; 12, un cube ? Non, « 3D » ! Force de la perspective, nous basculons dans le volume. L’auteure-illustratrice nous balade de choses perçues en représentations imaginaires qui nous laissent tout étonnés de simplicité et de force. Ainsi, de toute évidence, un fragment de ligne est « une ligne ». Si elle occupe toute la page, c’est l’horizon. Deux lignes d’horizon superposées, et voilà une route ; quatre identiques, un champ ; cinq égales (plus une clé de sol), une portée…
Delphine Perret nous donne l’impression d’une infinie possibilité avec si peu de moyens que c’en est comique. Un trait en appelle un autre, un mot en entraîne un autre. La portée, et quelques points bien situés, c’est « une langue, un code, une écriture, une mélodie, un chef-d’œuvre » ; quelques points en désordre (les mêmes ?) et la « cacophonie » règne. Peu de mots, aucune démonstration, juste la liberté de création à l’œuvre dans le langage écrit comme dans le langage graphique.
Delphine Perret joue avec les formes, les couleurs et tout ce qu’elles nous disent du réel : vert, rouge, brun, appliqués à une pomme c’est… « pas encore bon, bon, trop tard ». Chaque page tournée apporte une nouvelle surprise, une découverte évocatrice…
L’histoire commençait par un point, mais se clôt-elle par un « point final » ? Non ! Par un « point de départ ». L’artiste s’efface devant le lecteur, à lui de relever le défi… Bravo l’artiste !
Présentation par l'éditeur
Un « O » pourrait indiquer un zéro ou un œuf, ou même une poule en anticipant, ou le souvenir d’une poule. Dans cet ouvrage le sens des images est bousculé par les interprétations possibles, car la représentation permet des lectures multiples : parfums, couleurs, le temps, tous les registres de la perception entrent dans ce jeu à multiple facettes.Manifeste pour la liberté de décoder, de s’affranchir des codes, « Kaléïdoscopage » raconte aussi la liberté de dessiner, celle qui est finalement si essentielle dans le champ visuel du livre pour enfants.