Fraîcheur !

Tout en retenue, ce recueil de poèmes publié par Thierry Cazals aux éditions du Pourquoi Pas, petite maison indépendante vosgienne très engagée dans la création, est une invitation à lâcher prise. L’auteur de La petite voix de la ficelle (Motus, 2021), passionné de poésie (Le petit cul tout blanc du lièvre, Motus, 2003 ; Un éléphant au paradis, Motus, 2011) est un amoureux des mots et un grand spécialiste des haïkus. À partir d’une sélection de ces petits poèmes japonais qu’il compare à « des bébés qui viennent de naître... comme si, à travers eux, nous redécouvrions le monde pour la première fois », œuvres du grand maître Issa Kobayashi (1763-1828) dit « Issa », Thierry Cazals compose ainsi une vingtaine de textes courts exhortant le lecteur à saisir toute la beauté et la fragilité de la vie. Dans un monde qu’il imagine déjà à 40°C, il invite au renoncement, à la simplicité volontaire, à « abandonner les paroles qui veulent trop dire, tout expliquer », à voyager léger, à s’attacher aux petits riens et à s’émerveiller de tout. Chaque phrase résonne, riche d’émotions et de silences. Des paysages se dessinent et repoussent l’horizon. « Écrire des poèmes c’est donner des oreilles aux mots », écrit l’auteur qui multiplie les images pour toucher les jeunes lecteurs. On relèvera même quelques notes d’humour quand Issa le poète fait sa sieste à l’ombre, « avec pour oreiller un livre de comptes » !

Au plaisir de la langue, s’ajoute celui des yeux : sur un papier ivoire, les dessins de l’illustratrice ardennaise Csil réalisés avec la technique de la gravure se déploient, pleins de finesse et de délicatesse, accordant au regard des moments de repos : dans l’ombre d’un pin solitaire par exemple ou sur une double-page avec un fond bleu et rien d’autre que la pluie. Enfin, l’ouvrage finement cousu tient presque dans la poche : parfait pour s'accorder à tout instant une petite dose salutaire de fraîcheur et de poésie.