Dans l'ombre du monde

Dans la vie, le pire est-il toujours sûr… supposition qui se glisse au creux d’une des nouvelles de ce recueil complexe de Maud Tabachnik , "Dans l’ombre du monde", et à laquelle elle répond de façon différente selon le récit. Huit nouvelles, autant d’univers de France aux Etats-Unis, d’Israël au Rwanda, autant de preuves du mal vivre d’est en ouest et du nord au sud, autant de héros malgré eux de la plus jeune, fillette excisée, au plus âgé, grand-père Abou, palestinien sur la tombe de son petit-fils. Pourtant même si Dieu est absent, quelques échappées laissent apparaître, sinon un espoir, du moins, une trajectoire d’hommes et de femmes qui dévie parfois l’ordre des choses. Vie des jeunes dans les banlieues, dans les prisons, situations de guerre, dans la plupart de ces intrigues, un espace ouvert échappe au désespoir au risque de la déception. « Elle était si jolie » raconte la rédemption d’un prisonnier qui, un jour, trouve, sauve, s’attache à un chaton. L’évolution est sensible, l’auteure accompagne pas à pas le répit qui s’installe, jusqu’au drame final. Par contre, « Cœur noire, douleur blanche », est construit sur une confraternité brisée avant l’apaisement, relatif, qui laisse l’avenir ouvert. De la même façon, dans « No right zone », les prémisses dramatiques s’effacent devant l’issue heureuse. La force de ces nouvelles tient à la diversité des voix recueillies par l’auteure. Nul jugement, des personnages bien dessinés, un sens de l’ellipse, une écriture dramatique très tendue comme dans le roman policier, - en particulier « Coups de pouce », le pluriel a son importance- appliquée à une dimension sociale que les informations journalistiques ou enquêtes sociologiques commentent quotidiennement, portent ces destins de papier que l’on voudrait croire uniquement fictifs. Un recueil très fort pour adolescents ou adultes.