La vache la plus riche du monde

Alors qu’une vache se prélasse paisiblement sous un pommier en écoutant le vent dans les branches et en regardant les nuages passer, un cochon, surgi de nulle part, lui souffle une idée : et si, au lieu d’abandonner les pommes dans l’herbe, elle se bougeait un peu pour les ramasser ? Elle pourrait en faire des tartes ou de la compote, qu’elle pourrait alors vendre et, avec l’argent, elle achèterait d’autres arbres, pour produire plus de fruits qu’elle transformerait ensuite dans des usines pour vendre encore davantage à coup de campagnes publicitaires et de goodies, jusqu’à devenir... la vache la plus riche du monde ! « Et après ? », rétorque la vache dubitative. « Après ? », poursuit le cochon, « vous trouverez un endroit tranquille pour faire la sieste à l’ombre, écouter le bruit du vent dans les branches et regarder les nuages passer dans le ciel ».

Si Barroux n’est pas le premier à traiter du sujet, cette fable, qui confine à l’absurde, a quelque chose de vraiment jouissif. Avec son humour habituel, l’auteur met le doigt sur cette folie qui consiste à accumuler sans cesse davantage pour finalement revenir au point de départ ! Inspirée du conte philosophique du « pêcheur mexicain et de l’homme d’affaires », l’histoire nous fait réfléchir sur le sens de la vie à une époque où l’on confond un peu trop facilement oisiveté et paresse et où la valeur du travail se mesure à l’aune de l’enrichissement matériel.

C’est toujours avec une pointe d’excitation qu’on découvre un nouvel album de Barroux. Cet illustrateur devenu auteur, installé en France après plusieurs années passées outre-Atlantique, nous régale avec ses ouvrages engagés et pleins de fantaisie. Et on ne peut qu’être convaincu par cette vache imperturbable, plus prompte à faire la sieste qu'à gérer un empire. Le dessin est expressif, enlevé, bourré de détails amusants et la palette est colorée avec cette petite pointe d’orange fluo pour le côté transgressif. L’ouvrage est publié aux éditions Les Arènes.

À peine sorti et déjà un classique.