L'heure bleue

Dans la famille de L'heure bleue, le père lit une histoire, la mère bricole et les enfants s’amusent. Nestor et sa sœur se bagarrent, ils bousculent le jeu de cubes de Nora. Noé est dans son bain, Nelson fait la cuisine. Les activités et les images s’enchaînent. Avec fluidité, on passe de l’un à l’autre. Tous sourient et forment une guirlande heureuse. Tous ? Pas vraiment. Au un bout de la chaîne, Nin n’écoute pas l’histoire racontée par son père et à l’autre bout, Nomi, le tout-petit, fait grise mine. Une grosse larme perle au bord de sa paupière. Le temps s’arrête. Toute la famille est en état de choc. Qu’a donc Nomi ? Chacun imagine un remède en lien avec son activité. Nestor et Nana supposent qu’il a eu peur, Noé qu’il faut le changer, maman, qu’il s’est fait mal. Seule Nin, qui semblait hors du jeu, connaît la cause, l’heure bleue, le blues, la mélancolie et son remède, le câlin de consolation jusqu’au sommeil bienheureux.

Les personnages de Ghislaine Herbéra tout en rondeur comme leurs ancêtres les Barbapapa, ont la vitalité et les jeux des enfants de tous les jours. Pourtant, ils ont des allures d’extraterrestres, hors du temps, entre passé (le baquet d’eau, le marchepied désuet) et futur (maman est habillée comme un « martien »). Ils y gagnent en force et en poésie graphique. Le texte simple est majoritairement parlé. Chaque personnage a sa part de la partition chorale de l’ensemble, à l’exception de l’explication finale, véritable dénouement des tensions. Tout en rondeur, tout en douceur, pour calmer les jeux et conduire vers la sérénité…