Long way down

Will, William Holloman de son nom complet, vit dans une banlieue américaine, joueur de basket avec ses copains dans la rue. Il voue une admiration sans borne à son grand frère, Shawn. Mais son monde s’écroule quand, dès les premières pages, son frère est tué d’une balle : « La vengeance dans le quartier se transmet comme un T-shirt de marque. Toujours trop grand. » Alors dans ce bouleversement, Will à son tour va obéir aux Lois : « N°1 : Ne pas pleurer. N°2 : Ne pas balancer. N°3 : Se venger. »

C’est un roman graphique percutant, adaptation du roman social éponyme, qui nous entraîne dans le chaos intime d’un ado dont les repères volent en éclats avec le meurtre de son frère. Seules les trois lois semblent le maintenir debout et lui donner une raison d’être. Mais il erre, en quête de celui qu’il pense être le tueur. Nous voici avec lui dans l’ascenseur qui descend les étages, le rapprochant du moment où, à son tour, il va régler ses comptes. Mais la descente est longue : confronté à ses doutes, il va rencontrer des fantômes, des proches disparus qui vont faire vaciller les seules certitudes qui lui restaient. Que va-t-il décider ?

Long way down, loin vers les bas, est une plongée dans un monde de règlements de comptes, de chaos, d’amour et de valeurs. Les illustrations de Danica Novgorodoff sont tout aussi saisissantes que les mots de Jason Reynolds : elles accompagnent le récit heurté, entre passé et présent, entre conversations avec les morts et vie de la cité. Comme le récit, elles facilitent nos passages d’une réalité à une autre et savent donner vie aux moments confinés dans l’ascenseur et aux hésitations de Will. La grande variété des planches (pleine page, avec case ou sans), les couleurs (bleu-gris pour le passé), les plans variés sont d’une grande richesse et nous atteignent en pleine face. Les lecteurs et les lectrices sont d’autant plus touché·e·s par la qualité de la relation entre les frères et la perte de l’être aimé que les vers du traducteur, le rappeur Insa Sané, savent se faire tour à tour percutants comme la détonation du revolver et doux quand les frères se parlent. Ainsi marqués par les paroles et les dessins, nous sommes d’autant plus sensibles à l’histoire.

Long way down est un récit sensible et poignant d’une réalité malheureusement ordinaire.