Mission océan : apprends les gestes qui sauvent le monde marin !

Sauver le monde marin, telle est la mission qu’assignent les auteurs à leurs jeunes lecteurs à partir de huit ans peut-on lire sur l’argumentaire fourni par l’éditeur. Ils seront parrainés par Sea Shepherd, l’ONG qui apparaît sur la couverture grâce à la représentation d’un petit bateau d’intervention rapide et la tête de mort symbole du drapeau pirate surmontant la houe du berger croisée avec le trident de Poséïdon… L’ouvrage est un documentaire à l’usage des plus jeunes, plutôt à partir de dix ans quand même. S’il est bon de produire des contenus informatifs et éducatifs sur des problématiques environnementales, la perception du public, encore plus si l’on prétend s’adresser à des jeunes enfants, doit être anticipée. Or cet ouvrage surfe sur la peur, sur le danger, sur la mort, en ne proposant que des solutions partielles et sans pointer les vrais responsables des dérèglements.

Sous une apparence joyeuse et fraîche comme un petit bain de mer, dans des dessins ou le bleu, le vert et le jaune sont les couleurs dominantes, les dauphins et les baleines, les requins et les tortues de mer sont montrés blessés, torturés, agonisants. Or même si ce constat est vérifiable, faire porter la responsabilité du changement sur le comportement quotidien d’enfants est illusoire et déplacé. Les informations proposées sont à la fois complexes et inquiétantes. Après un premier chapitre sur l’océan à l’origine de la vie étayé par des schémas clairs très accessibles et bien adaptés au public, le ton devient rapidement anxiogène et les auteurs veulent démontrer combien la violence de l’action humaine est destructrice pour le milieu marin, et donc pour la vie sur Terre. Les modifications climatiques, les dangers de la surpêche ou de la pollution les entraînent à en appeler à la responsabilisation des enfants quant à la préservation des coraux, la liberté des dauphins, ou encore la lutte pour la sauvegarde de la biodiversité.

Le dernier chapitre montre combien l'océan et ses créatures ont toujours fasciné les hommes, et en même temps alimenté leurs peurs au détriment de ses habitants naturels, mais la description qui suit des monstres des grands fonds en est, a contrario, une nouvelle page. L'action des hommes et femmes de Sea Shepherd est présentée comme unique mais aussi vengeresse, pour contrer les exploiteurs de l’océan et les massacreurs de poissons, sans pour autant expliquer les raisons du massacre.

Les auteurs ont perdu le fil du message premier (sensibiliser les enfants à la préservation de l'océan) et cédé à la tentation catastrophiste. Les derniers chapitres sont maladroits, leurs informations deviennent des assertions, et leurs conseils comminatoires : « N’arrache jamais un morceau de corail… ! ». Mais les enfants en auront-ils seulement l’occasion ?

Enfin, le choix du drapeau pirate par les Sea Shepherd a sûrement une explication, il aurait été profitable de la présenter aux enfants. Après tout, les pirates n’ont pas vraiment la réputation d’être les sauveurs de l’humanité, non ?

Un sujet important, des auteurs à l’engagement indispensable, mais un ensemble déséquilibré mal étudié pour le public ciblé.