Orang et Outang

Orang et son cousin Outang découvrent un enclos grillagé avec des habitations dedans, au cœur de la forêt. Curieux, ils demandent au gardien (un ami) ce dont il s'agit : un hôtel pour riches touristes dirigé par Monsieur Fred, leur répond l'autochtone. Orang et Outang décident de visiter les lieux, mais les singes sont interdits. Ils parient alors avec l'odieux Monsieur Fred qu'ils arriveront à rentrer. La clôture électrifiée les laisse ébouriffés, les déguisements ne sont pas au point... Puis, les compères se font passer pour des touristes arrivés massivement dans un car : ça marche ! Ils repartiront même aux Etats-Unis, tandis que leur mère ramène à l'hôtel les deux touristes qu'ils ont dépouillés de leurs habits.

Après le potager (Trois contes cruels, Ecole des Loisirs, 2013), nous arpentons la jungle, et les deux auteurs n'ont rien perdu de leur humour, souvent féroce. Les héros de leur histoire touristique ne sont pas forcément sympathiques d'emblée, et agaceraient plutôt. Les relations qu'Orang et Outang entretiennent avec les villageois radoucissent cependant leur image : on les considère en tant qu'« hommes de la forêt » au passé ancestral et pas simplement des singes, une minuscule part de la faune. Après, il faut quand même voir leurs têtes expressives et leurs déambulations de garnements en quête de bêtises !
Plaisanteries autour des personnages à part, le court roman évoque tout un ensemble de sujets d'actualité : déforestation sans conscience, tourisme de luxe et consommation à tout va sont opposés à la protection de la nature et à celle des traditions en accord avec l'environnement. Les villageois ne répètent pas pour rien, sur un ton un brin fataliste : « Les choses changent »... Le lecteur aura bien des réflexions, lancées çà et là, à cogiter. Textes et illustrations s'accordent donc parfaitement, avec la même volonté de dynamiser et dynamiter les attentes de lecture pour mieux nous questionner. Un ouvrage... étrange et joyeux !