Peau de lapin

Au commencement, il y a la dune, les oyats piquants et le bruit des vagues.
Il y a aussi les lapins, Touffu et Taffeta, dans leurs terriers de dune.
Puis apparaissent les premières maisons, puis la ville tout entière. Elle grignote le sable et transforme le paysage.
Les lapins sont chamboulés. Ils en perdent leur latin et leurs repères. Ils ne savent plus comment ils s’appellent ni ce qu’ils font encore là.
« Roulés-boulés, recroquevillés, ratatinés, ébouriffés, éparpillés, oubliés. »
La dune a disparu.
La ville dévorante aura-t-elle la peau des lapins haut la main ?
C’est sans compter sur la nature qui, peu à peu, reconquiert le territoire…
Cet album à l’italienne est une fable subtile sur l’équilibre et l’harmonie rompus entre nature et cité, entre hommes et animaux. A travers deux lapins de dune, on suit avec plaisir et intérêt ce duel inégal. Les lapins luttent, trouvent des solutions ingénieuses pour pouvoir vivre là où ils sont nés.
Cette histoire à l’écriture ciselée est bellement mise en images par Brunella Baldi, dans une déclinaison délicate d’ocres et de bleu gris. Les seuls êtres vivants et animés d’une farouche volonté sont, dans ces pages, les animaux : lapins, mouette, baleine et coquillages. Et le vent qui souffle.
Jamais on ne voit les hommes. Ils ne sont présents que par ce qu’ils construisent à tort et de travers, ou ce qu’ils laissent à l’abandon derrière eux. Cela donne au récit une force singulière. Magnifique.