Brèves rencontres avec ma mère

Simone a été adoptée tout bébé par des parents aimants, très impliqués dans la défense des libertés civiles. A 16 ans, elle n'a pas envie de connaître ses parents biologiques. Mais c'est Rivka, sa mère naturelle, qui la contacte : Juive d'une famille orthodoxe, enceinte hors mariage, elle a été obligée d'abandonner sa fille et, aujourd'hui malade, veut la connaître avant de mourir. D'abord réticente, Simone va comprendre peu à peu l'importance de ce lien du passé.
Brèves Rencontres avec ma mère a l'intensité d'un premier roman sorti du cœur. L'auteur réussit à aborder trois thèmes tous aussi délicats les uns que les autres, sans jamais tomber dans le pathos ou les clichés : l'adoption, la maladie (et la mort), la religion. La narratrice Simone, jeune fille heureuse et élevée dans l'athéisme, se retrouve subitement confrontée à toutes ces questions existentielles. A ces bouleversements se rajoutent ceux de l'adolescence, et un premier amour qu'elle n'ose pas initier. Mais, qu'elle soit suffisamment solide de par son éducation ou que ces difficultés se rejoignent finalement dans un même élan de vie vers l'âge adulte, elle réagit avec une relative sérénité. Pas de crises, pas de blocages, Simone sait exprimer ses émotions et demander de l'aide quand elle en a besoin. En petits chapitres progressifs, elle nous expose ses hésitations, ses réflexions. Elle admet qu'un futur ne peut pas se construire sans connaître le passé, le sien plus complexe mais aussi plus riche qu'un autre. Elle découvre la religion – ici juive, mais peu importe au fond – dans ce qu'elle a de structurant et de destructeur. Elle comprend l'importance de vivre l'instant présent pour ce qu'il est, et dans le même temps de garder la mémoire de sa vie. Face à elle, parents adoptifs ou non, groupe d'ami(e)s d'enfance, tous l'aident à grandir en douceur, à faire le deuil d'un monde où tout est stable. En épilogue, Simone fait le deuil de ses "fantasme[s] d'enfant" (p. 254) et commence à prendre seule des orientations importantes. Un beau roman dense et sensible sur l'adolescence et la filiation, traduit dans un français plus qu'impeccable (trop ?).