D'où je viens ?

Sur le mode humoristique, Philip Bunting donne des réponses sérieuses à cette question insoluble. De l’origine inconnue jusqu’au big bang, on ne sait pas grand-chose et cela suscite ce commentaire d’une petite pomme aux yeux ronds qui regarde le lecteur : « Dur, dur ! », dit-elle. Oui, il faut accepter ce rien avant de s’émerveiller sur la constitution des éléments de base représentés sous la forme classique de molécules animées avec de petits yeux ronds et une bouche, plutôt contentes de s’agréger.

La construction du temps est traitée avec fantaisie (« en moins de temps qu’il ne t’en faut pour manger une glace » ; « au bout d’un certain temps » ; « au bout d’une période incroyablement longue » ; « très très longtemps » ; « plus récemment ») et on voit bien le parti-pris de Philip Bunting : ne pas encombrer son jeune lecteur par des approximations temporelles qui n’auraient pas de sens pour lui mais tracer des trajectoires. Le jeu du « tu » et du « nous » implique le lecteur et l’amène à situer les éléments les uns par rapport aux autres : planètes, soleil, lent refroidissement, etc. La planète Terre naît mais pas encore la vie. Cette dernière est annoncée par un « Tada ! » très familier. On nous explique que « toute vie n’a qu’une origine ». Les petits dessins simplissimes ont d’abord une fonction comique, petit à petit ils vont prendre une forme reconnaissable mais l’auteur invite à ne pas prendre au pied de la lettre ses illustrations. Ainsi les lecteurs apprécieront le chapeau pointu rouge du poisson : « [...] c’était peut-être son anniversaire ».

Tout est raconté avec la même distance ironique et affectueuse. On apprend qu'un jour « un petit poisson, modeste mais travailleur » se décide à quitter l’eau pour la terre ferme. « Nous descendons tous de cet amphibien entreprenant », nous dit le livre. Et alors la longue chaîne de l’évolution est tracée. Pour nous aider l’illustrateur oriente les transitions. Les animaux ne sont pas nommés, mais les enfants reconnaîtront les grands sauriens jusqu’au singe tout étonné de se retrouver dans un arbre ; tout comme, d’ailleurs, le bipède humain, très surpris d’être vu tout nu !

A partir de là, tout va très vite, les chemins des voyages et migrations se croisent et tout cela pour arriver à celui que l’auteur interpelle, « toi ». Le livre s’achève sur un hymne à la vie et à sa fragilité, au travail que chacun doit au monde…

C’est drôle, vif, suffisamment schématique pour soutenir l’attention et suffisamment juste pour identifier les étapes de la création de la vie. Un album documentaire bien adapté à la diffusion de connaissances de base, enrichies au fil des curiosités qui suivront.