Excursion guidée en littérature ado
Un compte-rendu du guide En quête d'un grand peut-être: guide de littérature ado, de Tom Lévêque et Nathan Lévêque, Éditions du Grand Peut-Être, 2020.
Un compte-rendu du guide En quête d'un grand peut-être: guide de littérature ado, de Tom Lévêque et Nathan Lévêque, Éditions du Grand Peut-Être, 2020.
L’expression «En quête d’un grand peut-être» est extraite du roman Qui es-tu Alaska? de John Green. Elle augure d’une interrogation, d’un cheminement au long duquel on trouvera des petits cailloux, des lueurs plus ou moins fortes en guise de réponses. Va-t-on pour autant compulser un pur ouvrage de recherche? Le sous-titre «guide», avec sa connotation pratique, nuance le positionnement de ce livre épais et rassurant. Il sera argumenté, mais aussi subjectif – que les deux auteurs apparaissent sur la couverture en est un autre signe.
Effectivement, Tom et Nathan Lévêque, passionnés de littérature jeunesse depuis l’enfance et jeunes adultes travaillant pour elle, se sont entourés d’un essaim d’auteurs, prescripteurs, éditeurs, etc. (mettez le tout au féminin et vous serez dans le vrai) pour répondre à leurs questions et participer à un Top 100 de la production ado écrite ou traduite en français entre 2000 et 2019. Cette partie sous forme de liste avec résumés est la plus attendue. Les interviews nominatives, à la façon d’un magazine, sont plus originales et donnent de la chair aux propos. Plaisir supplémentaire, quelques auteurs et autrices reconnu·e·s se sont prêté·e·s au jeu de la nouvelle, délices en trois pages.
Les deux frères entourent ces blocs de leurs propres réflexions, agencées en quatre chapitres: un historique, les fameuses frontières d’âge, les thématiques et leur traitement au regard de la société, l’éditorialisation et son avenir. Leurs connaissances, leur passion et leur hauteur de vue apparaissent pleinement. S’ils s’appuient sur une multitude de témoignages et sur des parutions devenues jalons (ne citons qu’Annie Rolland et Qui a peur de la littérature ado?, Thierry Magnier, 2008), ils n’en réalisent pas moins un très beau travail de synthèse et d’appropriation.
Ce qui fait la richesse du propos – l’apport de multiples avis d’intervenants extérieurs – est aussi sa limite: les blogs, les chaînes Youtube, les profils Instagram sont certes soigneusement choisis pour leur antériorité, mais ne se manifesteront certainement pas de cette façon dans dix ans. Admettons donc ce parti pris d’ancrage dans 2020, impossible à éviter mais très perceptible ici. Et finalement, pourquoi ne pas se donner rendez-vous pour une nouvelle édition mise à jour en 2030, quelques cheveux gris en plus?
* Sophie Pilaire est bibliothécaire. Elle écrit depuis de nombreuses années des chroniques pour Ricochet.