Hazel la petite sorcière : une année dans la forêt

Encore un livre de rêve pour l’enfance. Cette petite sorcière joliment prénommée Hazel, prénom frémissant de promesses, est l’un de ces personnages qui laissent leur empreinte à la fois délicate et indélébile dans la mémoire.

Les merveilleuses illustrations de Phoebe Wahl, aux couleurs de la forêt, alternent les plans larges et rapprochés qui retiennent le regard sur les multiples détails d’une nature sauvage et magique, peuplée d’elfes, de sylphes et de trolls qui cohabitent avec les grenouilles, et parlent avec les oiseaux, les papillons et les taupes. Hazel, une toute petite bonne femme ronde comme une noisette, aux joues rouges comme son chapeau pointu, vit parmi ce petit monde toute une année de quatre saisons, ou chapitres, pendant lesquelles l’enfant lecteur assistera à la naissance d’une chouette nommée Otis qui aime voyager de nuit, à une fête estivale sur la rivière, au sauvetage d’un troll abandonné à l’automne, et enfin à un hiver givré par un blizzard glacial, où Hazel et Otis se retrouvent enfin.

L’image est parfois arrondie aux angles et l’entourage blanc lui donne une perspective qui renforce l’intimité du lien entre le lecteur et le livre, comme à travers une lunette particulière. D’autres fois, le texte est inséré dans des bulles qui s’étalent comme la plainte du petit troll à travers la double page ; l’autrice les utilise aussi pour des exclamations, des dialogues, une astuce plus directe et vivante qu’un passage narratif, vite repérable par l’enfant et qu’il reprend à son compte. La police en larges capitales bien lisibles dynamise aussi l’illustration. Pourtant celle-ci est déjà d’une grande variété, ah ! la baignade estivale dans l’eau fraîche et courante de la rivière, foisonnante, tant de couleurs que de motifs, surdimensionnés par rapport à la petite taille de Hazel ; une héroïne pleine de sagesse et de bonté qu’elle dispense autour d’elle comme une digne représentante de celles, souvent indépendantes, érudites et respectueuses de la nature, qu’on a souvent discriminées et condamnées sous l’appellation « sorcière ».

Si ce si joli livre n’est pas ouvertement une introduction au féminisme, l’exemplarité de ce personnage très atypique dans la galerie traditionnelle des personnages féminins merveilleux est, dans la grande simplicité qui fait aussi sa force, un très beau contre-modèle et une source d’inspiration pour une image renouvelée des filles. Ce troisième titre de Phoebe Wahl aux éditions des Éléphants est un vrai plaisir de lecture.