L’enfant racine

Voici un album que Kitty Crowther a écrit et illustré et il y a de quoi se réjouir, car c’est sur ses propres textes que son dessin s’accorde le mieux, affaire de sensibilité. Ici, elle s’inspire de l’atmosphère du conte merveilleux, plus précisément de l’imaginaire de la forêt, un univers peuplé de légendes. Leslie vit seule dans un endroit qui pourrait bien être le bout du monde, juste derrière la forêt. En suivant les traces d’un renard qui égorge ses poules, elle fait la connaissance d’une créature étrange vivant dans une galerie souterraine, un enfant racine, et accepte de le prendre sous son aile. Cette rencontre bouleverse la vie de Leslie, bouscule sa solitude et lentement, les deux êtres apprennent à se connaître, à vivre ensemble, jusqu’au jour où d’autres enfants racines viennent chercher leur semblable pour le ramener chez eux, dans les profondeurs de la terre. Leslie devra accepter cette séparation, mais tous les ans, observant le même rituel, elle retrouvera l’enfant racine sous un rayon de lune. Par des mots et des situations simples, Kitty Crowther explore des sentiments profonds et complexes, l’attachement de deux êtres vivant chacun en marge du monde et en marge des autres ; loin des images de bonheur idyllique, elle montre aussi la vie dans ce qu’elle peut avoir de douloureux, lorsqu’elle nous oblige à renoncer à un être cher parce qu’il est différent. Dans son dessin aussi, tout est simplicité, toujours au crayon, elle dessine des décors oniriques, chargés de mystère, et des personnages qui nous semblent immédiatement familiers. Une belle histoire que celle de cet « enfant racine », à lire entre les lignes.