Un coupable presque parfait

1934, au sein d'un pensionnat pour jeunes filles de bonne famille anglaises. Daisy Wells et Hazel Wong ont fondé un club de détectives et cherchent des énigmes à résoudre. Daisy est la présidente, la « Holmes » impérieuse du duo, tandis que la gentille Hazel prend note de leurs aventures comme le faisait Watson en son temps.

Leur association prend une ampleur inattendue lorsque Hazel découvre dans le gymnase le cadavre de la professeur de sciences, Miss Bell. Quelques instants plus tard, le corps a disparu. Mais les deux jeunes filles ne sont pas dupes, et l'enquête commence méthodiquement. Il s'agit d'abord d'examiner les emplois du temps et les alibis de chacun des enseignants, puis de trouver la victime, enfin de comprendre les motivations et de confondre l'assassin. Evidemment, Daisy et Hazel ne pensaient pas qu'elles se mettraient en danger...

L'atmosphère de l'époque et du lieu est rendue avec une grande finesse : en apparence, les pensionnaires sont délicieusement bien élevées, protégées des turpitudes du monde extérieur. En réalité, mais sans jamais que les faits ne soient explicites, elles se chamaillent sans cesse entre elles (les « crevettes » et les « grandes »), et les professeurs peuvent être colériques, alcooliques, et de toute façon s'arrêtent de travailler lorsqu'elles se marient. Envoyée là par un riche père anglophile, Hazel vient de Hong-Kong – colonie britannique à l'époque – et a du mal à s'habituer aux froideurs du pays natal de Georges V, ce qu'elle retranscrit régulièrement dans sa narration.

Cet univers de haute bourgeoisie ou d'aristocratie, feutré et bien huilé, n'est d'abord pas tant bouleversé par la disparition de Miss Bell. On invente une démission, les rumeurs courent, mais le crime met longtemps à être pris en compte. Nos deux détectives évoluent donc facilement dans les couloirs et les salles afin de mener leurs recherches. Elles avancent scientifiquement, contrariées un moment par la subjectivité de Daisy, mais globalement très sérieuses. Ce sont bien elles qui découvrent le coupable avant de remettre l'affaire dans les mains de la police.

Robin Stevens, qui a inventé là une série, sait se mettre à hauteur du jeune lecteur sans sacrifier les codes bien établis de l'enquête à la Conan Doyle : c'est très réussi. Reste à savoir si l'univers soigné et suranné parlera encore aux enfants du XXIème siècle.