Une Moto dans la nuit

« Il est encore tôt et on n’a pas besoin de tout savoir à une heure aussi matinale. » (p. 140). Il n’empêche que le narrateur, jeune adolescent, aimerait bien savoir pourquoi ses parents ont disparu un beau matin, le laissant seul avec son oncle Leonard, alcoolique fini… Le retour de son frère aîné, beau garçon à moto qui vit de trafics, va peut-être lui apporter un début de réponse.
Une Moto dans la nuit se présente comme une chronique intime que le narrateur agence strictement, en trois parties et de courts chapitres, comme pour donner du sens à sa vie et ses actions pour le moins disparates. Le thème de la fuite envahit complètement le récit. Que ce soit une échappée réelle avec la moto du frère, le radeau emprunté à Huckleberry Finn de Mark Twain, ou bien une évasion symbolique à travers l’alcoolisme de l’oncle et les visions sur la rivière du héros, les personnages ne semblent pas franchement assumer la réalité des choses. Peu importe au fond où sont partis les parents (on devine une secte dans les dernières pages ?), le propos est celui d’un avenir incertain. Et pour chacun, la construction s’en fera seul : les membres de cette famille de bric et de broc parlent peu, ne montrent pas leurs sentiments. La fin, si elle bascule dans un certain onirisme, laisse entrevoir un espoir. Ce curieux roman, fort et exigeant, exige de se laisse porter comme au fil d’une rivière… pour la récompense d’une émotion en profondeur.