Le théâtre du poulailler

Projetée dans des responsabilités d'adulte à la disparition de sa mère, Hannah s'occupe de ses deux jeunes sœurs, en comptant malgré tout sur l'appui de son père, fermier honnête, endetté. La toute jeune fille a une passion : le théâtre, que ce soit l'écriture d'une pièce, sa mise en scène ou ses comédiens. Elle s'inscrit avec sa meilleure amie à un concours de création théâtrale, dont le prix en argent sonnant et trébuchant pourrait aider à payer le loyer de la ferme, mais dont la condition est... de posséder sa propre salle. Qu'à cela ne tienne, les filles investissent un vieux poulailler et le transforment en merveilleuse antre de Molière ! Le reste de l'entreprise ne sera toutefois pas aisée, entre jalousies à l'école et créanciers qui se rapprochent...

D'emblée, le lecteur adopte ce joli monde pourtant pas idéal, mais pétri de valeurs qui font chaud au cœur : amitié au-delà des petites querelles, respect des autres et de la nature, droiture et énergie qui n'empêchent pas le doute émotionnel. L'intrigue promet d'abord de se dérouler tranquillement, et on imagine déjà les filles gagner le concours. Le devenir de la ferme demeure davantage problématique ; on pressent cependant que l'essentiel résidera dans la famille unie (y compris Martha, la sœur un peu peste qui rêverait d'urbanité).

Et puis, les débrouillardes préadolescentes vont forcer le destin et rebondir elles-mêmes de surprise en surprise, jusqu'à la fin qui oscille joliment entre convenu et inattendu – une fin heureuse, rassurez-vous. Suivies par un narrateur externe en parfait équilibre entre neutralité et bienveillance, ces petites joueuses de théâtre nous emportent avec dynamisme dans leurs petits et grands drames, confiantes en la vie envers et contre tout. Certes, les adultes ne sont jamais loin (aidants ou angoissants, voir le père qui pleure après les vaches vendues et fait s'écrouler la confiance d'Hannah), mais on peut compter sur les personnalités et les volontés des jeunes héroïnes, ainsi que sur le gros mouton Jasper, pour assurer le bonheur de cette ferme pas comme les autres. N'ayons pas peur des comparaisons : avec son style propre, à la fois pétillant et bon enfant mais jamais lourd (le détail est d'importance), Le Théâtre du poulailler rappellerait volontiers un Michael Morpurgo !