Sur les traces de Walipo

Espagne, début du XIXème siècle. Orphelin, Gabriel est envoyé au Venezuela, promis comme soldat pour rembourser les dettes de sa famille. Il découvre un pays ravagé de moustiques, de querelles pour l’indépendance, de soif de l’or… Il fait aussi la connaissance de la jolie Indienne Walipo, aussi peu causante qu’efficace dans ses tâches de servante. Emmené au cœur de l’Amazonie pour combattre les rebelles qui remettent en cause la couronne espagnole, Gabriel va peu à peu réviser son jugement de jeune impétueux prêt à en découdre.
Quand on pense à l’Amérique et à l’Espagne, on pense à Christophe Colomb d’abord, puis aux grandes conquêtes glorieuses, à la colonisation forcée un peu moins, à l’écrasement de toute une culture sans doute pas. Il faut s’y intéresser pour savoir. C’est d’ailleurs le chemin psychologique explicite que Gabriel va vivre, grâce à Walipo d’un côté, à un chercheur d’or baroudeur de l’autre. Walipo impose lentement son point de vue à Gabriel sans même ouvrir par la bouche, utilisant une sorte de résistance passive que le jeune narrateur ne ressentira qu’après avoir observé attentivement la fille. Mise en confiance, Walipo montrera alors son adaptation totale à son environnement, ébranlant les certitudes de Gabriel si mal armé dans la forêt vierge : et si le Venezuela n’était pas pour les Espagnols ? Le chercheur d’or, lui, gagnera le cœur du héros par son caractère paternel – il ne faut pas oublier que Gabriel n’a pas quinze ans -, sans réussir toutefois à le convertir à ses idées révolutionnaires. Gabriel ne veut pas faire de politique, ni devenir riche, ni même chercher à réconcilier les peuples. Au terme d’un périple violent et dangereux, il optera pour la décision radicale de vivre en Indien. On peut s’interroger sur cette fin tranchée, mais Yves-Marie Clément a suffisamment balisé son roman pour que le lecteur, lui aussi, prenne le parti de l’harmonie dans la nature. Un roman historique que l’on pourrait malheureusement aisément transposer de nos jours…